Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 23

CHAPITRE 2 - Reconnaissance de la relation de travail
indice dès lors que l'une des parties en fixe unilatéralement les modalités. Analysant les conditions du tournage, la
Cour retient que :
- les participants avaient l'obligation de participer aux différentes activités et réunions (pouvoir de direction et de
contrôle) ;
- ils devaient suivre les règles du programme définies unilatéralement par le producteur (notamment les heures de
réveil et de sommeil) et étaient orientés dans leur conduite, certaines scènes étant répétées (pouvoir de direction) ;
- le règlement leur imposait une disponibilité permanente, avec interdiction de sortir et de communiquer avec l'extérieur (pouvoir de contrôle) ;
- toute infraction aux obligations contractuelles pouvait être sanctionnée par le renvoi, peu important qu'aucune sanction n'a été prise (pouvoir de sanction).
Ensuite, caractérise « l'existence d'une prestation de travail » celle qui a « pour objet la production d'une « série télévisée », prestation consistant pour les participants, pendant un temps et dans un lieu sans rapport avec le déroulement
habituel de leur vie personnelle, à prendre part à des activités imposées et à exprimer des réactions attendues, ce qui la
distingue du seul enregistrement de leur vie quotidienne ». C'est la première fois que la Cour donne une définition de
la prestation de travail. Même si l'origine latine du mot travail renvoie à la souffrance, il importe peu que l'activité
exercée soit manuelle ou intellectuelle, ludique ou exempte de pénibilité. Si être soi-même dans un documentaire
n'est pas une prestation de travail, les émissions de télé-réalité ne sont, quant à elles, qu'un leurre en ce que la réalité
n'est pas filmée telle qu'elle est mais telle que le désire la société de production dans son seul intérêt.
Enfin, la société de production contestait le lien de causalité entre la rémunération versée et l'activité offerte par les
participants ; « le versement de la somme de 1 525 euros à valoir sur l'exploitation, postérieurement au tournage, de
l'image, du nom ou pseudonyme des participants n'est pas une rémunération donnée en raison du travail fourni ». La
Cour de cassation a validé l'appréciation souveraine des juges du fond qui ont estimé qu'en renonçant pour certains
participants à l'exploitation de leur image, nom ou pseudonyme, la somme versée par la société ne pouvait avoir
« pour cause que le travail exécuté ».

Pour aller plus loin
* Cass. crim., 15 déc. 2015, nº 14-85638 : justifie sa décision la cour d'appel qui, pour condamner une société du chef
de travail dissimulé, retient, que, sous le couvert de mandats qu'elle avait établis avec d'anciens salariés ayant pris
ensuite le statut d'auto-entrepreneur, ces derniers fournissaient en réalité des prestations les plaçant dans une situation
de subordination juridique permanente par rapport à la société.
* Cass. soc., 9 mai 2001, nº 98-46158 : est écartée l'existence d'un contrat de travail entre une association Emmaüs et un
compagnon dès lors que ce dernier en intégrant la communauté Emmaüs s'est soumis aux règles de vie communautaire
qui définissent un cadre d'accueil comprenant la participation à un travail destiné à l'insertion sociale des compagnons
et qui est exclusive de tout lien de subordination.

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