Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 46

L'ESSENTIEL

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1

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

DU TRAVAIL

Cass. soc., 3 mai 2011, nº 09-67464 ; CE, 15 déc. 2010,
nº 316856

Cass. soc. : un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il
constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Le fait pour un salarié qui
utilise un véhicule dans l'exercice de ses fonctions de commettre, dans le cadre de sa vie personnelle, une infraction
entraînant la suspension ou le retrait de son permis de conduire ne saurait être regardé comme une méconnaissance par
l'intéressé de ses obligations découlant de son contrat de travail.
CE : un agissement du salarié intervenu en dehors de l'exécution de son contrat de travail ne peut motiver un licenciement
pour faute, sauf s'il traduit la méconnaissance par l'intéressé d'une obligation découlant de ce contrat. Le fait, pour un
salarié recruté sur un emploi de chauffeur, de commettre, dans le cadre de sa vie privée, une infraction de nature à
entraîner la suspension de son permis de conduire, ne saurait être regardé comme une méconnaissance par l'intéressé de
ses obligations contractuelles à l'égard de son employeur.

■ Faits
Dans les deux affaires, un salarié amené à conduire un véhicule dans l'exécution de son travail s'était vu retiré son
permis de conduire après avoir commis des infractions en dehors du temps et du lieu de travail. Ce fait peut-il être
assimilé en une faute disciplinaire traduisant une méconnaissance de ses obligations découlant du contrat de travail ?
À l'unisson, les juridictions judiciaire et administrative (compétente en cas de licenciement de salariés protégés) répondent par la négative.

■ Portée
Dès 1994, la chambre sociale, qui protégeait déjà la vie privée des salariés, a inventé le concept de vie personnelle afin
d'offrir une sphère d'immunité disciplinaire plus large (voir déjà en doctrine, M. Despax, « La vie extraprofessionnelle du
salarié et son incidence sur le contrat de travail », JCP 1963, I, p. 1776 et s.). Ainsi, si l'employeur se place sur le terrain
disciplinaire pour licencier un salarié à raison d'un fait de la vie personnelle, le licenciement est nécessairement
dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que ce fait ne peut pas en lui-même constituer une faute. Ce principe,
repris dans l'arrêt du 3 mai 2011, supporte une limite : « un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier une sanction disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de
son contrat de travail ».
Le Conseil d'État n'a jamais retenu le concept de vie personnelle, préférant s'en tenir aux notions classiques de droit
des contrats, comme l'atteste la décision du 15 décembre 2010 : « un agissement du salarié intervenu en dehors de
l'exécution de son contrat de travail ne peut motiver un licenciement pour faute, sauf s'il traduit la méconnaissance
par l'intéressé d'une obligation découlant de ce contrat ».
Cette immunité de la vie personnelle est pleinement justifiée. En dehors du temps et du lieu de travail, le salarié n'est
plus sous la subordination de son employeur et redevient un être humain jouissant d'une vie privée mais aussi d'une
vie publique indépendante de la relation de travail. Le contrat de travail n'est pas à exécution permanente mais à
exécution cyclique ; la « location » de la force de travail est limitée dans le temps. Si la protection de la vie personnelle
est justifiée, la plus grande difficulté reste de définir ce qui se situe « en dehors de l'exécution du contrat de travail ».
La vie professionnelle - composée d'éléments des vies privée et publique - est déterminée à travers trois critères alternatifs : un critère temporel (temps de travail), un critère spatial (locaux de l'entreprise, des clients...), un critère
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