Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 89

CHAPITRE 9 - Évolution du contrat de travail
raison pour laquelle l'assemblée plénière affirme qu'un lien de droit entre les employeurs successifs n'est pas nécessaire
(illustrant les potentialités de l'adverbe « notamment » utilisé par l'article L. 1221-4 du Code du travail). Ainsi, en cas de
perte de marché, le donneur d'ordre ou le chef de réseau peut mettre à la disposition des différents prestataires des
locaux et des matériels identiques d'exploitation, ce qui matérialise un transfert de détention, peu important que le
donneur d'ordre ou le chef de réseau soit resté propriétaire des éléments corporels. En l'espèce, dans l'arrêt
commenté, l'assemblée plénière relève que l'entité avec ses éléments matériels d'exploitation « avait été transférée,
permettant au nouveau concessionnaire d'en poursuivre l'activité ». Il convient de noter cependant que seul le transfert
de moyens corporels ou incorporels significatifs est pris en compte. Contrairement à ce que décide la Cour de justice
de l'Union européenne, lorsque l'activité en cause repose exclusivement sur des moyens humains (comme un service
de gardiennage ou de nettoyage), la décision d'un donneur d'ordre de changer de prestataire accompagnée d'une
reprise partielle du personnel n'emporte pas, en soi, transfert de l'entité économique.
Enfin, le transfert suppose une conservation de l'identité. Sa perte a été admise lorsque la finalité de l'activité est entièrement modifiée chez le nouvel exploitant. Tel est le cas de la substitution d'une activité de fourniture de plats d'un
traiteur extérieur par un service de restauration interne assuré par un atelier d'apprentissage professionnel destiné aux
travailleurs handicapés et encadré par des éducateurs spécialisés. Un temps, la Cour estimait aussi que la reprise d'une
entité par un établissement public administratif entraînait la perte de l'identité de l'activité car les conditions d'exploitation étaient radicalement différentes. Contredite par la Cour de justice, elle a opéré un revirement de jurisprudence,
solution désormais codifiée à l'article L. 1224-3 du Code du travail.

Pour aller plus loin
* Cass. soc., 11 mars 2003, nº 01-41842 : les licenciements prononcés par un liquidateur judiciaire sont privés d'effet
lorsque l'entité économique, constituée par un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels
permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre, est transférée à un repreneur. Le
salarié licencié à l'occasion d'un tel transfert a le choix de demander au repreneur la poursuite du contrat de travail
rompu ou à l'auteur du licenciement la réparation du préjudice en résultant. Toutefois, le changement d'employeur
s'impose à lui lorsque le cessionnaire l'informe, avant l'expiration du préavis, de son intention de poursuivre, sans modification le contrat de travail, de sorte qu'en ce cas, le salarié licencié ne peut se prévaloir des conséquences du licenciement à l'égard du cédant, pour invoquer des créances d'indemnités de rupture.

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