Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 92

L'ESSENTIEL

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

DU TRAVAIL

1 Cass. soc., 14 nov. 2000, nº 98-42371
Aucune clause du contrat de travail ne peut valablement décider qu'une circonstance quelconque constituera une cause
de licenciement. Il appartient au juge d'apprécier, dans le cadre des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 122-14-3 [L. 1235-1]
du Code du travail, si les faits invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement peuvent caractériser une cause
réelle et sérieuse de licenciement.

■ Faits
Le contrat d'un salarié commercial stipulait que « la non-réalisation d'un ou de plusieurs objectifs, à concurrence de
20 % de l'objectif annuel sur chaque trimestre et pendant deux trimestres consécutifs, pourrait être considérée par la
société comme un motif de rupture du contrat de travail ». Licencié en raison de la non-atteinte des objefctifs, le
salarié a saisi la juridiction prud'homale. Débouté en appel, il a formé un pourvoi en cassation qui a censuré l'arrêt.

■ Portée
L'arrêt du 14 novembre 2000 pose le principe selon lequel « aucune clause du contrat de travail ne peut valablement
décider qu'une circonstance quelconque constituera une cause de licenciement », prohibant ainsi la stipulation des
clauses résolutoires et de résiliation. Ces clauses, assurant plus de sécurité juridique et reposant sur l'autonomie de la
volonté, sont courantes en droit commun des contrats (C. civ., art. 1225). Mais, en droit du travail, leur régime est
dicté par l'ordre public social. Valables au profit des salariés, elles ne sauraient être admises au profit de l'employeur.
L'article 6 du Code civil interdit, par conventions particulières, de déroger à l'ordre public (C. civ., art. 1162). Aux
termes de l'article L. 1231-4 du Code du travail, « l'employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de
se prévaloir des règles prévues par le présent titre » sur la rupture du contrat de travail à durée indéterminée. Sont
assurément impératives les dispositions assurant l'effectivité du droit à l'emploi garanti par l'alinéa 5 du Préambule de
la Constitution du 27 octobre 1946 et par l'article 4 de la Convention OIT nº 158. Les articles L. 1232-1 et L. 1232-3 du
Code du travail disposent en ce sens que : « tout licenciement pour motif personnel [ou économique] est motivé dans
les conditions définies par le présent chapitre. Il est justifié par une cause réelle et sérieuse ». De même,
l'article L. 1235-1 du Code du travail déclare que « le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure
suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments
fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ». Le caractère
d'ordre public résulte donc tant des conditions de fond du licenciement que de l'obligation formelle de motivation.
D'abord, les conditions de fond tenant à la vérification de la réalité et du sérieux de la cause de licenciement justifient
la mise à l'écart de la liberté contractuelle. La cause réelle suppose son objectivité (reposant sur des éléments matériellement vérifiables et non un sentiment subjectif comme la perte de confiance ou l'incompatibilité d'humeur) et son
exactitude (les juges vérifiant la cause première et déterminante afin d'éviter, par exemple, qu'un motif personnel
masque un motif économique). Le caractère sérieux, standard difficile à appréhender, offre aux juges un large pouvoir
d'appréciation ; selon les travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 1973 sur le licenciement, le motif est sérieux lorsqu'il rend difficile le maintien du salarié à son poste sans dommages (de toute nature) pour l'entreprise.
L'appréciation de cette cause justificative dépend de la cause qualificative invoquée, la summa divisio étant celle qui
sépare le motif personnel, inhérent à la personne du salarié (subdivisé en deux sous-catégories, le motif disciplinaire et
le motif « individuel » regroupant l'insuffisance professionnelle, l'inaptitude et le trouve objectif au fonctionnement de
l'entreprise), du motif économique, non-inhérent à la personne du salarié et lié à la situation de l'entreprise. À titre

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