Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts du Droit international privé 2017-2018 - 2e - 118

L'ESSENTIEL

116

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

INTERNATIONAL PRIVÉ

7 Cass. 1re civ., 28 mars 2013, nº 11-19279
Vu l'article 509 du Code de procédure civile ; [...]
Qu'en statuant ainsi, en ajoutant à la décision étrangère de divorce, déjà déclarée exécutoire en France, des dispositions
concernant les intérêts patrimoniaux des ex-époux sur leurs biens situés en France, alors qu'il n'appartient pas au juge de
l'exequatur, mais au seul juge compétent au fond, de se prononcer sur ce point, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
(cassation)

■ Faits
Un jugement canadien a prononcé le divorce d'époux tous deux de nationalité iranienne et canadienne. Les juges du
fond ont octroyé l'exequatur à la décision canadienne. Leur décision est devenue irrévocable après le rejet du pourvoi
formé par l'ex-épouse. L'ex-mari a saisi de nouveau le juge français afin de voir compléter, à titre principal, le jugement
d'exequatur par la désignation d'un notaire aux fins de liquidation du régime matrimonial des ex-époux. Subsidiairement, l'ex-mari a demandé que soient ordonnés la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux situés en France
des ex-époux ainsi que la désignation d'un notaire à cet effet. La cour d'appel a fait droit à la demande principale de
l'ex-mari.

■ Portée
La décision de la cour d'appel a été censurée au visa de l'article 509 du Code de procédure civile, qui dispose que « les
jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes reçus par les officiers étrangers sont exécutoires sur le territoire de la République de la manière et dans les cas prévus par la loi ». La Cour de cassation retient une conception
stricte des pouvoirs du juge de l'exequatur, en refusant à celui-ci le pouvoir de désigner un notaire ou d'ordonner la
liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux d'ex-époux. Comme l'indique la Cour de cassation, ce pouvoir
appartient au juge compétent au fond, c'est-à-dire au juge aux affaires familiales.
La raison essentielle motivant la solution ainsi retenue tient à la nature objective du contrôle de l'exequatur. Ce
contrôle vise à s'assurer de la régularité internationale du jugement étranger. Le juge de l'exequatur ne peut modifier
la décision étrangère ni la remplacer par une nouvelle décision. L'instance en exequatur ne porte pas en tant que tel
sur le litige auquel le jugement étranger a apporté une solution, mais sur la compatibilité de ce jugement avec les
exigences du for avant de lui donner force exécutoire en France. Or, pour la Cour de cassation, la cour d'appel a
ajouté à la décision étrangère, qui a déjà été déclarée exécutoire en France, des dispositions relatives aux intérêts patrimoniaux des époux sur leurs biens situés en France.
La solution aurait-elle été différente si la demande complémentaire de l'ex-époux, au lieu d'être formulée postérieurement à la demande d'exequatur, l'avait été en même temps ?
La Cour de cassation a déjà admis que le juge de l'exequatur peut se prononcer sur une demande additionnelle. Le
juge de l'exequatur est autorisé à assortir l'exécution en France d'une décision étrangère d'une condamnation à des
intérêts moratoires (Cass. 1re civ., 6 mars 2007, nº 04-17127, Delsey ; Cass 1re civ., 19 nov. 2015, nº 14-25162). De
cette façon, le juge de l'exequatur s'assure de l'exécution de la décision étrangère. Il ne modifie nullement celle-ci
pour éviter que lui soit reprochée une révision du jugement étranger. Le pouvoir de révision du jugement étranger a,
dans un premier temps, été supprimé pour les jugements rendus en matière d'état des personnes (Cass. civ., 9 mai
1900, de Wrède, commentaire Chap. 5), puis cette suppression a été étendue à tous les jugements (Cass. civ., 7 janv.
1964, Munzer, commentaire Chap. 2).

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