Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts du Droit international privé 2017-2018 - 2e - 140

L'ESSENTIEL

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DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

INTERNATIONAL PRIVÉ

1 Cass. 1re civ., 10 oct. 2012, nº 11-18345
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a justement relevé que la Convention franco-belge du 8 juillet 1899 était
uniquement applicable aux litiges entre Français et Belges, et qu'en l'espèce, toutes les parties étant de nationalité belge,
la compétence devait être déterminée selon le droit commun français qui désigne le tribunal du lieu de situation de
l'immeuble ;
Attendu [...] que la cour d'appel a retenu à bon droit que les règles relatives à l'attribution préférentielle sont, en raison de
leur destination économique et sociale, des lois de police de sorte qu'ont vocation à s'appliquer celles que fixe la loi du lieu
de situation de l'immeuble ; (rejet)

■ Faits
Deux époux de nationalité belge sont décédés, l'un en 1995, l'autre en 2006. Ils ont laissé pour leur succéder quatre
enfants de nationalité belge résidant en Belgique. Une exploitation agricole située en France faisait partie de la succession. L'un des héritiers a demandé au juge français l'attribution préférentielle de l'exploitation. L'exception d'incompétence du juge français soulevée par les autres héritiers a été rejetée par la cour d'appel, qui a ordonné l'attribution
préférentielle de l'immeuble litigieux. Le pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel a été rejeté.

■ Portée
Le droit commun français attribue une compétence exclusive de principe à l'ordre juridique du pays de situation de
l'immeuble. Le juge français est donc compétent pour statuer sur la demande d'attribution préférentielle d'une exploitation agricole située en France. Pour tenter d'échapper à la compétence du juge français, les demandeurs au pourvoi
ont invoqué, en vain, la compétence du juge belge en tant que juge du lieu d'ouverture de la succession, sur le fondement de la Convention franco-belge du 8 juillet 1899 sur la compétence juridictionnelle, l'autorité et l'exécution des
décisions judiciaires, des sentences arbitrales et des actes authentiques. En effet, cette convention bilatérale ne
s'applique que dans les litiges entre Français et Belges et aux seules questions non réglées par le droit de l'Union
européenne.
Toutefois, si l'arrêt rapporté retient l'attention, ce n'est pas en raison de l'aspect lié à la compétence juridictionnelle,
mais parce qu'il est le premier à statuer sur la question très débattue de la loi applicable à l'attribution préférentielle
d'immeuble dans le cadre d'une succession internationale.
Certes, la controverse doctrinale était largement théorique lorsque l'attribution préférentielle ne portait que sur des
immeubles alors régis par une loi successorale correspondant à la lex rei sitae. Mais les attributions préférentielles
portent également, depuis de nombreuses années, sur des meubles. Plusieurs qualifications étaient envisageables : la
qualification successorale, celle de lois de police ou encore un rattachement au statut réel (v. Perreau-Saussine L.,
JCP G 2012, 1368).
Bien qu'elle ait l'assentiment de la majorité de la doctrine, la qualification successorale, pourtant admise sur le terrain
des conflits de juridictions, est écartée s'agissant de la loi applicable. Mais les juges n'ont pas eu recours au raisonnement conflictuel classique, puisqu'ils ont privilégié la qualification de lois de police, certes proposée par quelques
auteurs (v. Mayer P., JDI 1981, p. 291, nº 16).
Pour justifier cette qualification, la Cour de cassation se réfère à la « destination économique et sociale » des règles
relatives à l'attribution préférentielle. Elle utilise par conséquent un raisonnement fonctionnaliste. Ainsi que cela a été
constaté, « la finalité d'un tel dispositif est d'éviter le morcellement d'unité économique » (Godechot-Patris S., JCP N

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