Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts du Droit international privé 2017-2018 - 2e - 174

L'ESSENTIEL

172

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

INTERNATIONAL PRIVÉ

10 Cass. 1re civ., 16 sept. 2015, nº 14-10373
Vu l'article 4 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles ;
[...] pour déclarer la loi française applicable au contrat de cautionnement, l'arrêt retient que le cautionnement est un
contrat autonome et que c'est bien avec la France que le contrat litigieux présentait les liens les plus étroits [...] ;
Qu'en statuant ainsi [...] la cour d'appel a violé le texte susvisé ; [...] (cassation)

■ Faits
Un prêt a été conclu en Italie auprès d'une banque italienne par un emprunteur résidant habituellement en Italie. La
caution résidait, quant à elle, en France au moment de la conclusion du contrat de prêt. La banque a assigné en paiement l'emprunteur et la caution. L'arrêt de la cour d'appel déclarant la loi française applicable à l'engagement de
caution a été cassé par la cour régulatrice.

■ Portée
Le contrat de cautionnement est régi par la loi d'autonomie, conformément à l'article 3-1º de la Convention de Rome
du 19 juin 1980 et l'article 3-1º du règlement Rome I. Encore faut-il que les parties aient choisi la loi applicable au
cautionnement ; à défaut, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Comme
le règlement Rome I, la Convention de Rome pose en son article 4, alinéa 2 une présomption aux termes de laquelle
« le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au
moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ». Appliquée au cautionnement, cette présomption
désigne la loi de la résidence habituelle de la caution.
À l'évidence, ce rattachement est destiné à protéger la caution par l'application d'une loi qu'elle est censée connaître.
En l'espèce, la mise en œuvre de cette règle conduisait à la désignation de la loi française, ainsi que l'a énoncé la cour
d'appel. Toutefois, selon l'alinéa 5 de l'article 4 de la Convention de Rome, la présomption est écartée « lorsqu'il résulte
de l'ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays ». La clause d'exception constitue un mécanisme correcteur dans l'hypothèse où le contrat ne présente pas de liens étroits avec le droit
déclaré applicable. Tel était le cas dans l'affaire examinée.
Le résultat de la détermination de la prestation caractéristique et de la localisation de son débiteur ne répondait pas
aux impératifs du principe de proximité. En effet, les autres facteurs de rattachement désignaient la loi italienne.
D'abord, cette loi s'appliquait au contrat de base, en l'occurrence le contrat de prêt. Par ailleurs, le lieu du siège social
du prêteur comme le lieu de résidence de l'emprunteur et le lieu de conclusion du contrat de cautionnement étaient
localisés en Italie. Le contrat de cautionnement avait, de plus, été rédigé en italien. Finalement, la résidence habituelle
de la caution constituait le seul élément de rattachement avec la France.
Une comparaison effective des liens existant entre le contrat et, d'une part, le pays dont la loi est désignée par la
présomption et, d'autre part, l'autre pays concerné par la situation est obligatoire. À défaut, la décision des juges du
fond est censurée (v. Cass. 1re civ., 10 févr. 2015, nº 12-13052).
Le jeu de la clause d'exception permet donc d'adapter le résultat, quant à la désignation de la loi applicable, en fonction des circonstances particulières de l'espèce. Dans le cadre de cette adaptation, le rattachement d'un contrat lié au
contrat en cause constitue un indice, comme l'a d'ailleurs indiqué la CJUE dans un arrêt de 2014 (CJUE, 23 oct. 2014,
nº C-305/13, § 51). Cette prise en considération ne peut conduire systématiquement à rattacher le contrat de cautionnement à la loi de l'obligation principale, malgré son caractère accessoire au contrat principal.

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