Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts du Droit international privé 2017-2018 - 2e - 18

L'ESSENTIEL

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

INTERNATIONAL PRIVÉ

3 Cass. 1re civ., 22 oct. 2008, nº 07-15823, Monster Cable
Vu l'article 3 du Code civil et les principes généraux du droit international privé ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la clause attributive de juridiction contenue dans ce contrat visait tout litige né du contrat,
et devait en conséquence, être mise en œuvre, des dispositions impératives constitutives de lois de police fussent-elles
applicables au fond du litige, la cour d'appel a violé le texte et les principes susvisés ; (cassation)

■ Faits
Une société américaine a conclu avec une société française un contrat de distribution exclusive de ses produits sur le
territoire français. Le contrat contenait une clause attributive de compétence aux juridictions de San Francisco en cas
de litige. Après résiliation du contrat par la société américaine, la société française a assigné celle-ci devant le tribunal
de commerce de Bobigny pour abus de dépendance économique résultant notamment de la rupture brutale de la relation commerciale sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce. La société américaine a contesté la
compétence du juge français en invoquant la clause attributive de juridiction. Tant les premiers juges que la cour
d'appel se sont reconnus compétents.

■ Portée
L'arrêt Monster Cable constitue une illustration du libéralisme dont fait preuve la jurisprudence française à l'égard des
clauses d'élection de for en matière internationale. L'efficacité d'une clause attributive de juridiction ne peut être
remise en cause par l'existence de lois de police applicables au fond du litige. La compétence internationale des juridictions françaises ne peut avoir pour fondement le caractère impératif des lois de police. Admettre une solution contraire
reviendrait à confondre compétence législative et compétence judiciaire.
Le visa de l'arrêt mentionne tant l'article 3 du Code civil que les principes généraux du droit international privé soulignant l'importance de la solution au regard des deux piliers, conflits de lois et conflits de juridictions, sur lesquels la
matière est construite. Certes, il n'est pas indiqué expressément quel principe général du droit est en cause, mais
celui-ci peut être aisément identifié. L'indépendance des compétences législative et juridictionnelle constitue l'un des
soubassements du droit international privé auquel la Première Chambre civile de la Cour de cassation s'est refusée à
porter atteinte.
Le jeu de la clause attributive de juridiction ne pouvait être écarté, contrairement à ce qu'avait décidé la cour d'appel
dont la motivation n'était guère convaincante. Celle-ci avait maladroitement centré le débat sur la nature du litige.
Pour les juges du fond, le litige ne relevait pas du champ contractuel permettant l'application de la clause attributive
de juridiction.
Cependant, pour la première chambre civile, la nature de l'action importe peu. Elle s'appuie sur le contenu de la clause
qui « visait tout litige né du contrat ». À l'évidence, le litige était couvert par la clause, l'abus de dépendance économique invoqué à l'encontre de la société américaine ayant nécessairement son origine dans la relation contractuelle.
L'action visant à obtenir des dommages-intérêts, même qualifiée de nature délictuelle (Cass. com., 6 févr. 2007, nº 0413178), a forcément un lien avec le contrat puisqu'elle concerne les circonstances dans lesquelles il a été rompu.
La solution affirmée dans l'arrêt Monster Cable, par la Première Chambre civile de la Cour de cassation à propos du
droit international privé commun, a été reprise par la chambre commerciale dans l'arrêt Lauterbach (Cass. com.,
24 nov. 2015, nº 14-14924). Dans un contentieux relevant du règlement Bruxelles I, la chambre commerciale affirme
que « seules les règles de conflit de juridictions doivent être mises en œuvre pour déterminer la juridiction

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