Les Carrés Rouges - L'essentiel des Grands arrêts du Droit international privé 2017-2018 - 2e - 20

L'ESSENTIEL

18

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

INTERNATIONAL PRIVÉ

4 Cass. ch. mixte, 20 juin 2003, nº 00-45629, École saoudienne
de Paris
Vu les principes de droit international relatifs à l'immunité de juridiction des États étrangers ;
[...] Attendu qu'en se déterminant ainsi par des motifs inopérants, alors que l'acte litigieux, consistant pour l'État saoudien
à ne pas déclarer Mme X... à un régime français de protection sociale en vue de son affiliation, n'était qu'un acte de
gestion administrative, la cour d'appel a méconnu les principes susvisés ; (cassation)

■ Faits
La salariée, professeur d'arabe à l'École saoudienne de Paris, a assigné son employeur devant la juridiction prud'homale
pour obtenir son affiliation à un régime français de protection sociale et réparation du préjudice subi du fait de
l'absence d'affiliation jusqu'alors. Par un arrêt infirmatif, la cour d'appel a rejeté les demandes de la salariée en raison
de l'immunité de juridiction dont bénéficie l'employeur. Sur pourvoi de la salariée, l'arrêt a été cassé au visa des principes de droit international relatifs à l'immunité de juridiction des États étrangers.

■ Portée
De manière classique, la Cour de cassation se réfère aux « principes de droit international », la matière des immunités
étant régie par le droit international en général et non par le seul droit international privé. Pour la Cour de cassation,
l'acte par lequel un État étranger ne déclare pas un salarié à un régime français de protection sociale, en vue de son
affiliation, constitue un acte de gestion administrative à l'égard duquel ne joue pas l'immunité de juridiction dont
bénéficie l'État.
Avec cette décision du 20 juin 2003, la Cour de cassation rompt avec la formule énoncée dans l'important arrêt
Société Levant Express Transport (Cass. 1re civ., 25 févr. 1969). Aux termes de cet arrêt, qui exclut l'intervention de
l'immunité vis-à-vis des activités de commerce, l'immunité ne pouvait être invoquée que si l'acte litigieux constituait
« un acte de puissance publique » ou avait été « accompli dans l'intérêt d'un service public ».
L'arrêt du 20 juin 2003 renoue avec la distinction classique « acte d'autorité » et « acte de gestion » posée par un arrêt
de la Cour de cassation du 19 février 1929 qui a consacré le caractère relatif de l'immunité de juridiction. À cette fin,
l'arrêt commenté écarte le critère objectif ou formaliste prenant en considération la nature intrinsèque de l'acte litigieux et la forme dans laquelle il a été passé. Quant au critère finaliste, celui-ci n'est plus tiré du but d'intérêt public
suivi par l'auteur de l'acte, mais de la participation de l'acte « par sa nature ou sa finalité à l'exercice de la souveraineté » de l'État en cause.
L'arrêt commenté énonce que « les États étrangers et les organismes qui en constituent l'émanation ne bénéficient de
l'immunité de juridiction qu'autant que l'acte qui donne lieu au litige participe, par sa nature ou sa finalité, à l'exercice
de la souveraineté de ces États et n'est donc pas un acte de gestion ». La lisibilité du critère actuel et son caractère plus
restrictif ont été soulignés (de Gouttes R., D. 2006, p. 609). Ses applications concernent pour l'essentiel des litiges liés
au contrat de bail d'immeuble souscrit pour le logement de personnel diplomatique (Cass. 1re civ., 20 sept. 2006,
nº 05-14199) ou au contrat de travail (Cass. soc., 28 févr. 2012, nº 11-18952).
Dans le cadre du contentieux lié au contrat de travail, la nature des fonctions exercées par le salarié n'est pas ignorée
dans l'appréciation de l'immunité de juridiction de l'État étranger. En témoigne un arrêt de la Cour de cassation du
31 mars 2009 (Cass. soc., 31 mars 2009, nº 07-45618) qui affirme que le juge français garde le pouvoir de vérifier la
réalité de la fermeture d'une délégation consulaire « et de statuer sur les conséquences du licenciement d'un salarié
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