Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit des obligations - 10e - 36

CHAPITRE 3 - La conclusion du contrat
du Code civil adhère, tout d'abord, à la thèse de la promesse créatrice d'un simple droit d'option : « le promettant
accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat dont les éléments essentiels sont
déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire ».
L'article 1124, alinéa 2, tranche ensuite, plus directement, la difficulté : « La révocation de la promesse pendant le
temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat promis ». Exit la jurisprudence consorts
Cruz !
L'article 1124, alinéa 3, envisage enfin l'hypothèse particulière, mais en pratique fréquente, de la promesse violée parce
que le promettant a traité avec un tiers : « Le contrat conclu en violation de la promesse unilatérale avec un tiers qui en
connaissait l'existence est nul ». On voit que les droits du tiers sont ici moins bien protégés qu'en matière de pacte de
préférence, puisque la seule connaissance de la promesse suffit à anéantir le contrat conclu. Cela étant, que fait-on si
le contrat ne peut être annulé ? L'exécution du contrat promis au bénéficiaire sera dans bien des cas impossible, si
bien que ce dernier n'aura d'autre choix que de réclamer des dommages et intérêts (Chantepie et Latina, op. cit.,
nº 266).

Pour aller plus loin
* Cass. soc., 21 sept. 2017, 2 arrêts, nº 16-20103 et nº 16-20104 : la jurisprudence consorts Cruz est-elle encore
d'actualité pour les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 ? Deux arrêts récents et remarqués de la chambre sociale
de la Cour de cassation conduisent à poser la question. En vertu d'une jurisprudence un peu étrange, la chambre
sociale décidait depuis quelques années qu'une « promesse d'embauche » valait contrat de travail. La conséquence
était que toute rétractation de l'employeur s'analysait en un licenciement, même lorsque le salarié n'avait pas encore
accepté sa proposition. Cette jurisprudence est désormais abandonnée. Renouant avec les qualifications du droit civil,
la Cour distingue : si la « promesse d'embauche » constitue une offre de contrat de travail (tel était le cas en l'espèce),
celle-ci peut être librement rétractée ; si elle constitue une promesse unilatérale de contrat de travail, « la révocation de
la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n'empêche pas la formation du contrat de travail
promis ». Voici donc une solution qui est, à la fois, directement inspirée des nouveaux textes du Code civil (bien que
non applicables en l'espèce), et radicalement contraire, quant au second point, à la jurisprudence inaugurée en 1993 !
Adoptée par la chambre sociale, cette position sera-t-elle suivie par les autres chambres de la Cour ? Le motif principal
de l'arrêt pourrait le laisser penser, car il est expliqué que « l'évolution du droit des obligations, résultant de l'ordonnance nº 2016-131 du 10 février 2016, conduit à apprécier différemment, dans les relations de travail, la portée des
offres et promesses de contrat de travail ». Il serait ainsi logique que les mêmes causes produisent les mêmes effets...
Pourtant, la troisième chambre civile défendait encore récemment, de son côté, la jurisprudence consorts Cruz
(Cass. 3e civ., 13 juill. 2017). Pour l'heure, les arrêts de 2017 ressemblent donc surtout à des revirements d'opportunité,
justifiés semble-t-il par des raisons de droit du travail.

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