Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit des obligations - 10e - 77

L'ESSENTIEL

DES

GRANDS

ARRÊTS DU DROIT DES OBLIGATIONS

7 Cass. 1re civ., 31 mai 2007, nº 05-21316
Mais attendu que dans un contrat synallagmatique, la fausseté partielle de la cause ne peut entraîner la réduction de
l'obligation ; (rejet)

■ Faits
Une personne avait acquis les actions d'une société et, de façon concomitante, la créance en compte-courant de son
vendeur (créance sur la société née d'un prêt). Alors que le prix des actions avait été déterminé en tenant compte du
prix fixé pour la seconde cession, l'acquéreur apprit que le montant du compte-courant avait été surévalué. Il sollicita
alors la réduction du prix payé pour les actions.
Débouté par la cour d'appel, il forma un pourvoi articulé autour de l'idée que la cause de son obligation était partiellement fausse.

■ Portée
L'arrêt commenté ne peut se comprendre qu'à la lumière du droit antérieur à la réforme du Code civil. Il exprime néanmoins une préoccupation constante, qui est le refus d'exiger une équivalence des prestations dans les contrats
synallagmatiques.
Sous l'empire du droit ancien, la question pouvait être, à la marge, posée sous l'angle de la lésion. Mais le principe
était celui de l'indifférence d'un tel vice contractuel, en dehors de quelques cas visés par les textes (ex. : vente
d'immeuble). Si bien qu'elle était, essentiellement, posée sous l'angle de la cause. La possibilité d'opérer un contrôle
d'équivalence des prestations échangées était, à ce titre, très limité : la cause étant considérée comme réelle et sérieuse
dès lors qu'elle n'était pas dérisoire, il n'y avait pas de place pour une « absence partielle de cause ».
L'arrêt rapporté intervenait cependant à la suite d'un précédent arrêt remarqué, rendu le 11 mars 2003, aux termes
duquel la Cour de cassation avait affirmé, au sujet d'une reconnaissance de dette dont le montant était supérieur au
montant réellement dû, que « la fausseté partielle de la cause n'entraîne pas l'annulation de l'obligation, mais sa
réduction à la mesure de la fraction subsistante ». Empruntant ainsi le canal de la fausse cause (qui était assimilée à
l'absence de cause par l'ancien article 1131 du Code civil), la haute juridiction laissait entendre qu'une réduction du
prix était possible lorsqu'un acte était, pour partie, privé d'intérêt.
C'était toutefois méconnaître la spécificité du cas jugé, qui concernait une reconnaissance de dette. Comme l'a
confirmé la Cour de cassation dans l'arrêt rapporté, cette solution n'avait pas, en vérité, une vocation générale :
« dans un contrat synallagmatique, la fausseté partielle de la cause ne peut entraîner la réduction de l'obligation ».
Aujourd'hui que la cause n'existe plus, la solution n'en est pas moins maintenue. Le nouvel article 1168 du Code civil
énonce en effet que, « dans les contrats synallagmatiques, le défaut d'équivalence des prestations n'est pas une cause
de nullité du contrat, à moins que la loi n'en dispose autrement ». C'est dire qu'en principe, la lésion ne vicie toujours
pas les conventions. L'exception pourra couvrir les hypothèses classiquement visées par le Code civil, peut-être aussi
certains cas de violence par abus de dépendance, dès lors qu'il s'agit de sanctionner l'obtention d'un « avantage manifestement excessif » (C. civ., art. 1163). Elle pourra encore couvrir certains cas autorisés par le droit spécial : on songe
en particulier au « contrôle judiciaire du prix » (Cass. com., 25 janv. 2017) qui peut être opéré sur le fondement de
l'article L. 442-6, I, 2º du Code de commerce. En revanche, dès lors que l'article 1168 ne vise que le « déséquilibre en
valeur » (Chantepie et Latina, op. cit., nº 430), ce n'est pas au titre d'une exception au texte que l'on signalera la

Table des matières de la publication Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit des obligations - 10e