Exos LMD - Note de synthèse - 1re - 94

NOTE DE SYNTHÈSE

jurisprudence pour laquelle l'harmonisation européenne du droit de la responsabilité
civile est une occasion de recadrer le droit français et, en particulier, de poser les limites
nécessaires à la réparation des dommages. Lorsque l'on se tourne vers cette nomenclature afin de savoir dans quel poste intégrer le préjudice d'angoisse de mort, la spécification est délicate. Le préjudice d'« angoisse de mort imminente » ne s'y trouve pas envisagé. Il faut alors se tourner vers les autres types de préjudice susceptibles de l'intégrer
tels que le poste de « souffrances endurées » englobant « toutes les souffrances physiques et psychiques », ainsi que les troubles associés que doit endurer la victime durant la
maladie traumatique. Il faut écarter son ajout au seul poste permettant d'intégrer de
nouveaux préjudices, celui de « préjudice exceptionnel permanent » en ce qu'il est
destiné à indemniser un préjudice consolidé. Traduisant les souffrances internes subjectives, le poste des souffrances endurées permettrait donc d'accueillir le préjudice
d'angoisse d'une espérance de vie abrégée. Celui-ci constituerait alors un aspect du
préjudice à réparer au titre des souffrances morales endurées par la victime. Une telle
identification devrait aboutir en toute logique à « exclure la réparation par une seconde
indemnité du préjudice d'angoisse née de la perspective de la mort ». Cet argument
constituait notamment celui du pourvoi devant la chambre criminelle en 2012 : « alors
que la réparation d'un dommage, qui doit être intégrale, ne peut excéder le montant
du préjudice ; que la cour d'appel a indemnisé les souffrances physiques et morales
de M. Julien Y. une première fois au titre du pretium doloris, et une seconde fois au
titre du préjudice de vie abrégée ; qu'en procédant ainsi à une double indemnisation
du même préjudice, la cour d'appel a méconnu les textes ». La Cour de cassation a poursuivi une voie contraire en consacrant cette angoisse comme un chef de préjudice autonome du pretium doloris et rejeté le pourvoi au motif que « sans procéder à une double
indemnisation, [la cour d'appel] a évalué séparément les préjudices distincts constitués
par les souffrances endurées du fait des blessures et par l'angoisse d'une mort imminente ». Elle a reconnu distinctement la « souffrance morale liée à la conscience d'une
mort imminente » du préjudice moral par ailleurs causé par les souffrances physique et
morale issues de l'infraction. De son côté la deuxième chambre civile, tout en admettant
qu'il convenait de réparer « l'ensemble des souffrances éprouvées sous diverses
formes » a admis l'indemnisation de la souffrance liée à la « conscience de la gravité de
son état et du caractère inéluctable de son décès et (...) des souffrances morales et
psychologiques notamment caractérisées par la perte d'espérance de vie ou l'angoisse
de mort ». Bien qu'ayant identifié séparément les deux chefs de préjudice, la réparation
a ici donné lieu à une indemnité commune. Traduisant par ailleurs un rapprochement
entre les deux ordres, le juge administratif a également reconnu à l'instar de la formation répressive, un droit à réparation du préjudice de conscience d'une espérance de
vie réduite.
11. - À supposer une conception étroite du poste de souffrances endurées, on pourrait
aisément reconnaître que les deux causes de souffrance ne doivent pas se confondre.
Les arrêts étudiés laissent bien à penser d'ailleurs que la réparation des souffrances
endurées n'implique nullement a priori celle du préjudice d'angoisse de mort imminente. Il apparaît donc clairement dans la jurisprudence que lorsque la victime ne
décède pas immédiatement, celle-ci éprouve un préjudice lié à l'appréhension de sa
mort à venir qui constitue une cause autonome d'indemnisation spécifique du préjudice
des souffrances endurées. Dans cette optique, doit-on redouter l'atomisation des souffrances morales « en une constellation de sous-chefs plus ou moins redondants » ? Les

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