Exos LMD - Note de synthèse - 1re - 97

THÈME 3 - Le préjudice d'angoisse

néanmoins très difficile pour le juge de parvenir à une évaluation précise du préjudice
d'angoisse éprouvé. L'angoisse ressentie varie d'une personne à l'autre et il est difficile
de la quantifier. Comment établir avec certitude le caractère approprié du montant
d'indemnisation d'un tel chef de préjudice ? Les victimes de l'amiante ont obtenu le
versement de montants allant jusqu'à 10 000 euros pour le fait d'avoir travaillé sur un
site contenant de l'amiante et la peur de voir peut-être un jour se développer une
maladie liée à l'exposition de l'amiante. Les montants d'indemnisation fixés dans les
arrêts étudiés apparaissent néanmoins cohérents relativement à la durée d'agonie de
chacune des victimes. À cet endroit, la difficulté d'établir des estimations cohérentes au
cas par cas pourrait être effacée par l'admission officielle d'un barème indicatif évitant la
disparité des solutions.
2º L'incidence du degré de conscience de la victime
15. - En outre, la reconnaissance et l'évaluation du préjudice d'angoisse de mort dépendent également du degré de conscience de la victime du caractère inéluctable de son
propre décès. La chambre criminelle n'a reconnu la transmission de l'action qu'en
l'absence de perte de conscience. Ce préjudice n'a en effet de consistance qu'à travers
les souffrances morales provoquées par la conscience de la réduction de cette espérance
de vie. La dimension subjective du préjudice intervient alors, impliquant la conscience
par la victime de l'issue fatale de son état. À juste titre, il est donc exigé que la victime
présente une conscience suffisante pour envisager sa propre fin. En témoigne l'espèce
particulière jugée par le tribunal correctionnel de Thonon-les-Bains le 26 juin 2013 dans
laquelle un terrible accident d'autocar a vu sept enfants trouver la mort et d'autres
passagers grièvement blessés lors d'une collision survenue sur un passage à niveau. Le
juge a accordé une indemnité spécifique au titre de l'angoisse d'une mort imminente à
certains enfants qui ont manifestement eu le temps de mesurer à l'arrivée du train la
certitude de leur mort mais pas à ceux qui ne s'en sont pas rendu compte. Il faut en
déduire que, lorsque la victime n'a pas, ou a perdu, sa conscience entre le moment de
l'accident et celui de la mort, ce chef de préjudice ne saurait donner lieu à indemnisation. Cette question a été au cœur du débat plus général portant sur la réparation du
préjudice extrapatrimonial de victimes en état végétatif ; car « l'indemnisation du préjudice moral des victimes privées de connaissance ne va pas de soi ». Lui est fréquemment
opposé la difficulté de constater la réalité du préjudice subi, la réalité que la victime
ressent une diminution de son bien-être. Ce débat entre objectivistes et subjectivistes a
précédemment été résolu en faveur des victimes sous peine de leur « ôter la qualité
d'être humain et [de] les assimiler à une chose ». Ne pas retenir le préjudice d'angoisse
de la personne plongée dans le coma aboutirait peut être à créer une franchise de
responsabilité pour le responsable. Dans l'hypothèse inverse, on assisterait à une
présomption : le juge considérerait comme acquis le fait que la personne souffre et
qu'elle subit un préjudice. Au final, cela conduirait à un traitement plus favorable pour
les victimes dans le coma que pour les autres ce qui paraît tout à fait condamnable. Mais
si l'on peut se réjouir de l'impossibilité d'exclure toute conscience d'une victime plongée
dans le coma, l'existence du préjudice de conscience de mort imminente constitue un
préjudice subjectif par essence qui exige la conscience de la victime pour être subi. La
victime doit être en mesure de se le représenter puisque cette qualité est consubstantielle à l'existence du préjudice. En d'autres termes, pour avoir conscience de sa mort
imminente, encore faut-il être conscient ! La chambre criminelle doit aussitôt être
approuvée pour avoir réduit le dommage à la mesure de la conscience de la victime,

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