Mémentos - Droit pénal du travail - 1re - 59

CHAPITRE 3 - Les responsables

et semble accepter la validité de la délégation en se fondant sur le critère non du contrat
de travail, mais de l'autorité hiérarchique23.

2. Les qualités du délégataire
Les conditions posées par la jurisprudence pour que la délégation soit valable doivent
être appréciées rétroactivement au jour de la décision de transfert de pouvoirs.
Ainsi, il a été jugé dans le cadre d'infractions à la sécurité que la responsabilité du dirigeant devait être retenue faute de preuve d'une délégation de pouvoirs valable, dès lors
qu'il n'est pas établi que le délégataire « âgé de 21 ans lors de la signature de la
première délégation, moins d'une année après son arrivée dans l'entreprise, ait disposé
d'une compétence et d'une autorité suffisantes »24.
Ces conditions sont au nombre de trois :
- la compétence du délégataire : le délégataire doit posséder les compétences
nécessaires à l'exécution de la mission déléguée. Cette compétence s'apprécie au
regard des diplômes, des aptitudes et de l'expérience dans la fonction occupée. La
formation dispensée ultérieurement joue aussi un rôle important25 : un chef de
chantier disposant d'une certaine expérience, mais non formé à la sécurité ne peut
pas être responsable d'un homicide involontaire. L'inexpérience est un obstacle à
l'exercice de l'autorité26. Est par ailleurs inefficace la délégation de pouvoirs réalisée
en faveur d'un délégataire condamné à une interdiction de gérer27 ;
- les pouvoirs et l'autorité du délégataire : le délégataire doit disposer du pouvoir
de donner des ordres et de les faire respecter. Il doit donc détenir l'autorité nécessaire sur le personnel à qui vont être commandées les tâches entrant dans sa
mission.
Cette condition implique que le délégant ait transféré une part de son pouvoir disciplinaire au délégataire. Ce transfert du pouvoir disciplinaire semble aujourd'hui
devenir aux yeux du juge du fond une condition de l'effectivité de la délégation28.
Le délégataire doit également disposer d'un minimum d'indépendance dans
l'accomplissement de sa mission29. Dès lors, s'il désapprouve l'action du délégataire,
le délégant n'a d'autre choix que de lui retirer les pouvoirs spécifiques qu'il lui avait
transmis ;
- les moyens mis à la disposition du délégataire : sont ici visés tant les moyens
matériels que les moyens financiers nécessaires à la bonne exécution de la mission
confiée. Dès lors, la délégation n'est pas valable lorsque le supposé délégataire « ne
disposait pas du pouvoir d'engager des dépenses d'investissement en matière de
plan de formation du personnel et de mise en conformité du matériel de production, ses pouvoirs, en ce domaine, se limitant à ceux de proposition et de mise en
œuvre »30. Il a été jugé de manière similaire que la délégation de pouvoirs en
matière de réglementation des conditions de travail n'est pas valable et donc sans
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23.
24.
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26.
27.
28.
29.
30.

Cass. crim., 14 déc. 1999, nº 99-80104.
Cass. crim., 8 déc. 2009, nº 09-82183 : Bull. crim., nº 210.
Cass. crim., 25 sept 2007, nº 06-85945.
Cass. crim., 26 mars 2008, no 07-84730.
Cass. crim., 22 août 2018, nº 17-83966.
Cass. crim., 31 janv. 2012, nº 11-84198.
Cass. crim., 21 nov. 2000, nº 98-45420 : Bull. crim., nº 384.
Cass. crim., 25 mai 2004, nº 03-84734.

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