Amphi LMD - Cours de droit des biens - 1re - 136

136 Cours de Droit des biens
produits par la chose, mais seulement grâce à elle. Plusieurs textes les soumettent
à des règles spécifiques. À propos de l'usufruit (mais le principe est transposable
à d'autres hypothèses, par exemple en cas de vente), l'article 586
indique que « Les fruits civils sont réputés s'acquérir jour par jour et appartiennent
à l'usufruitier à proportion de la durée de son usufruit ». À l'inverse, les
fruits naturels ou industriels s'acquièrent par leur perception (art. 585, a contrario).
La
distinction des fruits naturels et des fruits industriels n'a pour sa part guère
d'importance pratique. Tout au plus affirme-t-on classiquement que serait
réservée aux fruits civils la règle de l'article 548 selon lequel « Les fruits produits
par la chose n'appartiennent au propriétaire qu'à la charge de rembourser
les frais des labours, travaux et semences faits par des tiers et dont la valeur
est estimée à la date du remboursement. » En réalité, le texte n'est pas explicitement
réservé aux fruits industriels et on pourrait concevoir de l'appliquer
dans certains cas à des fruits naturels.
235 - Précisions : distinction des fruits et produits. Il ne faut pas
confondre les fruits et les produits. Ceux-ci sont des valeurs que la chose
peut fournir avec altération de sa substance (par ex. le minerai extrait
d'une carrière). Les choses dont on extrait des produits ne sont donc pas
forcément frugifères. L'extraction des produits a pour effet de diminuer la
valeur de la chose et participe ainsi du droit de disposition. L'intérêt de
distinguer les fruits des produits est net en cas de création d'un droit de
jouissance sur la chose, tel l'usufruit. L'usufruitier a en effet le droit aux
fruits de la chose, mais pas aux produits (v. infra, nº 315).
En l'absence de droit de jouissance, la distinction des fruits et des produits est
moins importante. Le plein propriétaire a en effet le droit non seulement aux
fruits de la chose, mais également à ses produits. Plusieurs textes confèrent
cependant un sort à part aux fruits. On verra par exemple qu'un possesseur de
bonne foi est tenu à restitution d'un bien mais peut conserver les fruits de la
chose, tandis qu'il doit rendre les produits (C. civ., art. 549 ; v. infra, nº 429). Un
arrêt a également retenu que lorsqu'un droit de sous-louer un bien n'avait pas
été conféré à un locataire, les sous-loyers perçus par le preneur constituent des
fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire (Cass. 3e
civ.,
12 sept. 2019, nº 18-20727).
À propos de l'usufruit, le Code n'applique pas de manière très stricte la distinction
des fruits et des produits. Il donne ainsi à l'usufruitier, qui n'a normalement
pas le droit aux produits, le droit de prélever certains éléments qui en sont
pourtant (v. infra, nº 317).
236 - Le droit de disposer (abusus). Le propriétaire a également le
droit de disposer de la chose (v. supra,nos
28 et s.). Il peut accomplir sur
elle toutes sortes d'actes, quand bien même ceux-ci conduiraient à sa
modification ou disparation : transformation, destruction, vente, abandon,
etc. L'article 537 indique à cet effet que « Les particuliers ont la libre disposition
des biens qui leur appartiennent, sous les modifications établies
par les lois ». Opérant des distinctions plus subtiles, la doctrine oppose la
disposition matérielle à la disposition juridique. La première se traduit par

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