Amphi LMD - Cours de droit des biens - 1re - 238

238 Cours de Droit des biens
perdue l'a achetée dans une foire ou dans un marché, ou dans une vente
publique, ou d'un marchand vendant des choses pareilles, le propriétaire
originaire ne peut se la faire rendre qu'en remboursant au possesseur le
prix qu'elle lui a coûté. » Il faut ainsi comprendre que lorsque l'acquisition
s'est faite dans un lieu qui inspire particulièrement la confiance de l'acheteur,
la revendication qu'autorise par exception l'article 2276, alinéa 2 suppose
le remboursement de l'acquéreur. Celui-ci subit donc une privation
du bien, mais non une véritable perte économique.
Il va de soi que, pour profiter de la règle de l'article 2277, le possesseur doit
remplir les conditions de l'article 2276, alinéa 1er
, en particulier l'exigence jurisprudentielle
de bonne foi.
D'après la Cour de cassation, si l'acheteur a été remboursé par le revendiquant,
il n'a plus de recours contre son vendeur (Cass. 1re
civ., 26 nov. 1956 : Bull. civ. I,
nº 429) - solution sans doute excessive.
La jurisprudence adopte une interprétation stricte de ce texte (v. par ex.
Cass. 1re
civ., 2 mai 1990, nº 87-18489). Elle exclut son application en présence
civ., 31 mai
d'une vente réalisée par l'intermédiaire d'un courtier (Cass. crim., 31 mars
1978, nº 77-91639) ou sur un marché aux puces (rappr. Cass. 1re
2005, nº 02-11137).
Il est également jugé que si le possesseur restitue le meuble à son propriétaire
sans exiger le remboursement prévu par le texte, il perd non seulement le droit
d'obtenir ce remboursement, mais aussi son action en garantie contre son propre
vendeur (Cass. 1re
civ., 7 nov. 1995, nº 93-15840).
428 - Existence d'un délai « balai » lorsque l'article 2276 ne s'applique
pas ? Depuis la réforme opérée en 2008, la question se pose de
savoir s'il n'existerait pas, en matière mobilière, un délai de prescription
acquisitive qui pourrait s'appliquer alors même que le possesseur ne remplirait
pas les conditions de l'article 2276. Avant 2008, un tel délai existait
en application de l'ancien article 2262, qui prévoyait un délai de prescription
trentenaire tant en matière immobilière que mobilière. Cependant, ce
texte n'a pas été repris tel quel par le législateur : le nouvel article 2372 ne
prévoit un délai de prescription trentenaire qu'en matière immobilière
(v. supra, nº 410). Quant à l'article 2224, qui prévoit un délai de prescription
de 5 ans relativement aux actions « mobilières », il fixe seulement un
délai de prescription extinctive (laquelle ne régit pas le droit de propriété :
v. infra, nº 471) et n'est donc pas applicable dans l'hypothèse qui nous
intéresse. Reste qu'il ne fait pas sens qu'un immeuble puisse se prescrire
plus facilement qu'un meuble, ce qui plaide, par un raisonnement a fortiori,
pour l'application en matière mobilière du délai de prescription trentenaire
de l'article 2372 précité.
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