Amphi LMD - Cours de droit des biens - 1re - 39

règles d'ordre public, un droit réel conférant le bénéfice d'une jouissance spéciale
de son bien », expression directement inspirée de l'article 608 de l'avantprojet
Capitant (v. infra, nº 343).
57 - Jurisprudence. Alors que les textes sont largement demeurés sans
changement depuis 1804, la jurisprudence a tenu son rôle d'interprète de
la loi et, à défaut de texte, de créateur de solutions. Les textes appellent
toujours interprétation : qui aurait pu dire, sinon, que l'électricité est un
bien meuble susceptible d'être volé (Cass. crim., 3 août 1912 : DP 1913, 1,
439) ? Que le locataire qui construit sur le terrain du bailleur sans que le
sort de la construction soit réglé entre eux doit être considéré comme un
« tiers constructeur de mauvaise foi » au sens des textes régissant le sort de
sa construction (Cass. 3e
civ., 14 nov. 2002, nº 01-02596) ? Qui d'autre que
le juge pouvait concilier la contradiction apparente entre les articles 692
et 694 relatifs à la servitude créée unilatéralement par le propriétaire d'un
terrain au moment où il le divise (v. infra, nº 375) ? Mais le juge judiciaire
est allé parfois plus loin, dans le silence des textes ou face à leur caractère
désuet, comme lorsqu'il a développé les obligations de voisinage (responsabilité
en cas de troubles anormaux ; abus de droit en cas de refus infondé
de laisser son voisin passer chez soi pour réaliser des travaux : v. infra,
nos
221 et 275), quand le Code avait pensé les propriétaires voisins
comme deux maîtres absolus chacun chez soi, ou qu'il a justement affirmé
le caractère absolu du propriétaire à pouvoir obtenir l'enlèvement ou la
destruction de la construction qui empiète sur son terrain, serait-il de
mauvaise foi (v. infra,nos
275 et s. et 296). La jurisprudence, créatrice de
droit, est essentielle à la compréhension du droit des biens.
Sur la reconnaissance d'un droit réel de jouissance spéciale sui generis,en
dehors des cas nommés prévus par le Code, v. supra, nº 56 et infra, nos
138
et 343.
58 - Les coutumes et usages. On trouve, en droit des biens plus
qu'ailleurs, trace des coutumes et des usages. On retrouve essentiellement
la coutume secondum legem,c'est-à-dire une coutume qui intervient en
vertu de la loi, à laquelle la loi renvoie pour la seconder. Il en va ainsi de
l'article 593 relatif au droit de l'usufruitier de prendre sur les arbres des
produits annuels ou périodiques « suivant l'usage du pays ou la coutume
des propriétaires » (le droit de jouir de la chose d'autrui se délimite souvent
par référence aux pratiques passées du propriétaire). C'est le cas,
encore, de la distance de plantation des végétaux par rapport au voisinage,
qui relève aussi de la coutume et des usages (C. civ., art. 671), ou de la
création d'une servitude entre deux immeubles à partir d'un aménagement
Chapitre préliminaire - Introduction générale
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