Amphi LMD - Cours de droit des biens - 1re - 77

des droits patrimoniaux (A) a fait l'objet de critiques et de tentatives de
dépassement qu'il faut évoquer (B).
Un paradoxe peut saisir l'esprit lorsque l'on constate que les droits extrapatrimoniaux
peuvent parfois être exploités et avoir de fait une certaine valorisation
pratique : l'image, la voix, le nom d'une personne connue, ou même les confidences
sur sa vie privée se négocient - pour de la publicité ou des écrits dans
des magazines, par exemple. De même, le préjudice résultant d'une atteinte
illégale à la vie privée ou à la présomption d'innocence sera-t-il le plus souvent
réparé par l'allocation de dommages et intérêts, donc par une créance pécuniaire.
Toutefois, ce n'est pas parce que ces droits peuvent parfois être rentabilisés
contractuellement et générer des profits pécuniaires, ou être réparés par
une créance monétaire en cas d'atteinte, qu'ils sont patrimoniaux. Ils demeurent
des droits inhérents à la personne, intrinsèquement inestimables et incessibles
par autorité de la loi.
Au demeurant, la frontière entre patrimonial et extrapatrimonial n'est pas
immuable. Ainsi, le lien de confiance qui peut unir un professionnel libéral à
son client ou son patient a longtemps été jugé comme relevant de l'extrapatrimonial
: la confiance ne se cède pas, et les contrats de cession de clientèles
civiles étaient jugés illicites (seul un droit de présentation du successeur à la
clientèle pouvait se monnayer). La solution fut inversée au début du XXI
e siècle :
il est désormais admis qu'un professionnel exerçant une activité civile puisse
céder sa patientèle ou clientèle à un successeur, tant que la liberté de choix
du patient reste sauvegardée. Sous cette réserve, la cession d'une clientèle
civile, c'est-à-dire la cession de tous les éléments qui permettent à un praticien
de retenir et conserver sa clientèle, est licite (Cass. 1re
17731), comme l'était déjà une cession de clientèle commerciale.
civ., 7 nov. 2000, nº 98A
La
distinction des droits réels et des droits
personnels
129 - Présentation de la distinction. Deux grandes catégories de
droits permettent d'accéder à une chose : le droit réel, qui donne directement
accès aux utilités d'une chose et à sa valeur, et le droit personnel, qui
peut obliger une autre personne (débiteur) par rapport à une chose (la
prêter, la louer, la transférer). Le droit réel est un lien immédiat et direct
entre une chose et une personne, au pouvoir de laquelle elle se trouve soumise.
Le droit personnel est le droit d'une personne contre une autre, qui
peut avoir trait à une chose : le rapport du titulaire du droit à la chose qu'il
prend pour objet est alors indirect et passe par une autre personne. Le
droit personnel est l'objet du cours de droit des obligations ; le droit réel,
celui de droit des biens.
Les Romains ne distinguaient pas en tant que tels les droits réels et les droits
personnels, mais les actions réelles et les actions personnelles ; à Rome, l'action
précédait en effet le droit. Dans le droit contemporain français, l'idée est
inverse. La procédure est au service du droit (pour le faire reconnaître et le
sanctionner), mais ce dernier lui préexiste. Le jugement, lorsqu'il statue sur
l'existence d'un droit, n'aqu'un effet déclaratif (de ce qui préexiste) et non
Chapitre 2 - Le patrimoine et les droits patrimoniaux 77
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