Amphi LMD - Cours de droit des biens - 1re - 93

des limites compte tenu de la mobilité des biens qu'ils concernent. Ainsi, on ne
peut empêcher un véhicule automobile d'être déplacé sur le territoire national
ou transporté à l'étranger.
En pratique, dès lors que les opérations sur les immeubles sont retracées sur
un registre, l'acquisition a non domino (c'est-à-dire à un non-propriétaire) d'un
immeuble est plutôt rare, l'acheteur pouvant vérifier le fichier immobilier pour
s'assurer des droits du vendeur. L'acquisition a non domino d'un meuble est
plus fréquente. Les droits de l'acheteur sont même consolidés par l'article 2276
du Code civil (v. infra, nº 417).
En droit des sûretés, l'hypothèque portant sur un immeuble confère au créancier
un droit de suite, c'est-à-dire la possibilité de se prévaloir de son hypothèque
sur l'immeuble malgré sa circulation (en pratique, le notaire va néanmoins
« purger » les droits sur l'immeuble avant de remettre le prix au
vendeur). En matière mobilière, aucune règle équivalente n'existe (v. C. civ.,
art. 2398 : « Les meubles n'ont pas de suite par hypothèque »). Le Code civil
avait néanmoins mis en place un substitut à la publicité en matière de gage
qui supposait la dépossession du meuble entre les mains du créancier, afin
que les tiers ne soient pas trompés sur le statut juridique des biens appartenant
à un débiteur (v. aujourd'hui art. 2337, al. 2). Lors de la réforme du droit des
sûretés opérée en 2006, le législateur organisa néanmoins un gage de droit
commun sans dépossession, supposant une inscription sur un registre national
(v. art. 2337, al. 1er
), lequel présente cependant l'inconvénient d'être exclusivement
lié à la personne du constituant (v. art. 2337, al. 3) et non lié à la chose
elle-même, comme il en va pour le fichier immobilier.
158 - Localisation des actions en justice relatives à un immeuble.
La fixité de l'immeuble a également conduit à une règle spéciale gouvernant
les actions en justice qui ont directement trait à un immeuble. Le
principe, en procédure civile, est que « La juridiction territorialement compétente
est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur
» (CPC, art. 42). Pour les immeubles, une règle différente est prévue :
« En matière réelle immobilière, la juridiction du lieu où est situé l'immeuble
est seule compétente » (CPC, art. 44 ; comp. CPC, art. 46). Il est
ainsi apparu plus simple et cohérent de localiser une telle action au lieu
de l'immeuble, tandis que les meubles, qui peuvent être déplacés, ne méritaient
pas un même traitement (cf. l'adage de Loysel qui, au XVII
e siècle,
écrivait déjà que « Le meuble suit le corps, et l'immeuble le lieu où il est
assis »).
159 - L'impossibilité théorique du vol d'immeuble. Une autre conséquence
de la fixité de l'immeuble a trait au droit pénal, qui refuse, au
moins en théorie, d'admettre l'infraction de vol relativement à un
immeuble. Le vol étant la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui, il
semble théoriquement impossible à caractériser relativement à une chose
immobile - en quoi il concerne essentiellement les meubles corporels. Il
faut néanmoins nuancer cette affirmation, dès lors que le vol de certains
immeubles est possible (cf. le cas des immeubles par destination qui peuvent
être déplacés : v. infra, nº 172) et que l'on peut tout à fait concevoir le
Chapitre 3 - Les classifications
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