Amphi LMD - Cours de droit des biens - 1re - 95

époux ne peuvent, l'un sans l'autre, aliéner ou grever de droits réels les immeubles,
fonds de commerce et exploitations dépendant de la communauté, non
plus que les droits sociaux non négociables et les meubles corporels dont l'aliénation
est soumise à publicité »).
Dans l'ancien droit, l'idée de différence de valeur entre les meubles et les
immeubles n'avait pas qu'une vertu explicative. Elle avait également une fonction
normative, en ce sens que certains biens pourtant insusceptibles d'être
déplacés, mais stériles, pouvaient être qualifiés de meubles (arbres fruitiers
non greffés), tandis que d'autres biens, mobiles mais frugifères, pouvaient être
considérés comme immeubles (rentes et offices). Aussi « l'adage " res mobilis,
res vilis " aurait-il gagné à être renversé dans la formulation : sous l'Ancien
Droit, ce sont moins les meubles qui sont des choses sans valeur que les choses
sans valeur qui sont des meubles » (Dross W., Droit civil. Les choses, 2012, LGDJ,
nº 339-3).
163 - Admission de la lésion pour le vendeur d'immeuble. L'une des
conséquences les plus nettes de l'idée a trait au droit des contrats. Le principe,
en la matière, est le rejet de la nullité des conventions pour cause de
lésion de l'une des parties, dans le cas où le contrat serait économiquement
défavorable pour elle. Une règle contraire est néanmoins prévue en cas de
vente d'un immeuble : « Si le vendeur a été lésé de plus de sept douzièmes
dans le prix d'un immeuble, il a le droit de demander la rescision de la
vente [...] » (C. civ., art. 1674). Alors que pour les meubles, la sécurité juridique
prévaut, on a jugé que la remise en cause des conventions devait être
possible à certaines conditions pour les immeubles compte tenu de leur
grande valeur.
Reste que, en écho à l'affaiblissement de la distinction des meubles et des
immeubles, de nombreuses lois ont admis des cas particuliers de la lésion en
matière mobilière (en cas de vente d'engrais, semences ou substances destinées
à l'alimentation des animaux, de cession de droits d'auteur... ; v. notre
Cours de droit des obligations,6e
éd., 2021, Gualino, Amphi LMD).
164 - La longue prescription acquisitive en matière immobilière.
La différence de valeur opposant en principe les meubles et les immeubles
explique également l'instauration d'une dualité de régime en matière de
prescription. En matière mobilière, la prescription acquisitive va opérer
de manière instantanée au profit de celui qui a la possession de la chose
(à certaines conditions : v. infra, nº 417), tandis qu'en matière immobilière,
le législateur a jugé intolérable une telle instantanéité et exige un délai de
plusieurs années ou décennies pour le jeu de la prescription acquisitive
(v. infra, nº 408).
165 - La spécificité des voies d'exécution en matière immobilière.
Dans le même ordre d'idées, des règles différentes régissent les procédures
d'exécution sur les immeubles et les procédures d'exécution sur les meubles.
Dans le premier cas, les garanties de procédure sont en effet plus
nombreuses. De plus, le législateur a instauré un dispositif général
Chapitre 3 - Les classifications
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