Fonction Publique - Droit hospitalier - 4e - 333

Chapitre 9 * Du service public hospitalier au service public de santé
beauté. La conclusion, inverse à la précédente, est que le marché de soins peut être saturé
alors même que les besoins essentiels en soins, tels qu'appréciés par le régulateur, sont déjà
satisfaits ;
- un troisième sens est que, littéralement, en offrant n'importe quels soins à une population,
il va y avoir un mouvement, spontané ou provoqué, de consommation de ceux-ci. C'est un
sens qui peut être infamant pour les praticiens, assimilés à des commerçants jouant sur les
angoisses des patients. De telles images se trouvent d'ailleurs dans la littérature34. C'est
également infantilisant pour le patient. Il existe sans aucun doute certains exemples isolés
correspondant à cette idée. Ce troisième sens marque surtout une défiance du régulateur
envers les comportements spontanés des offreurs et consommateurs de soins.
Pour ces raisons, utiliser cette formule mérite de prendre la peine d'en préciser le sens donné.
L'idée générale, parfaitement acceptable et acceptée, est que l'autorégulation du marché des
soins ne permet pas d'atteindre naturellement les objectifs de santé publique assignés. L'intervention du régulateur est donc nécessaire.
b) Le marché des soins hospitaliers est naturellement imparfait
Le marché des soins est loin d'être un marché uniforme dans ses caractéristiques. Il sera question
ici des seuls soins hospitaliers, et non de la médecine libérale.
En matière d'offre de soins hospitaliers, le premier constat est qu'il ne s'agit pas d'un secteur
propre à développer naturellement une forte concurrence entre une multitude d'acteurs. En
effet, offrir des soins hospitaliers nécessite une infrastructure (plateau médicotechnique, blocs
opératoires, services administratifs...) particulièrement lourde et donc coûteuse. Sous l'effet
de l'évolution des pratiques, avec des appareils et des pratiques toujours plus spécialisés, c'est
par ailleurs un phénomène qui ne cesse de s'accroître. Il y a encore 50 ans pouvaient exister
des cliniques particulières possédées par une seule personne, ne traitant que d'une seule pathologie. Ce niveau intermédiaire est aujourd'hui en voie de disparition. Les cabinets libéraux
renforcent eux-mêmes leurs infrastructures en groupant plusieurs praticiens. Par ailleurs, un
fort phénomène de concentration est en œuvre au sein des groupes privés35. Ce phénomène de
concentration s'apprécie même aujourd'hui au niveau international avec des rachats de filiales
possédant des centaines d'établissements.
À l'inverse, la demande en soins hospitaliers serait naturellement très faible. Il s'agit en effet
d'un service coûteux à mettre en œuvre, donc coûteux à consommer. En outre, le rayonnement
territorial est limité, ne permettant pas de toucher un marché suffisamment vaste pour amortir
les coûts. En réalité, sans le financement de l'assurance maladie qui permet de solvabiliser la
patientèle, l'offre de soins hospitaliers ne se limiterait qu'aux grandes agglomérations, avec une
patientèle aisée suffisamment développée. De même, aujourd'hui encore, la concurrence fron34 Le célèbre Dr Knock de Jules Romain, le « Schtroumpf docteur » de Peyo ou encore le Dr Armstrong d'Agatha Christie
(Dix petits nègres) qui s'était fait métier de médicaliser les sautes d'humeur des femmes de la haute société anglaise.
35 C'est l'un des objectifs des GHT de copier cette concentration dans la sphère publique.

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