Droit en Poche - Droit de la formation professionnelle tout au long de la vie - 1re - 49

La reconnaissance juridique de l'alternance
« L'alternance » a supplanté l'apprentissage jusque dans la sémantique
juridique. Avant la loi du 5 septembre 2018, ce terme n'était juridiquement pas défini et ne restait utilisé qu'avec parcimonie. On ne le trouvait d'ailleurs pas dans la sixième partie du Code du travail consacrée à
« la formation professionnelle tout au long de la vie ». Désormais cité
près d'une trentaine de fois, la consécration légale de « l'alternance »
par la dernière loi change la donne (v. Boterdael S., « Le cadre juridique renouvelé de l'apprentissage », Dr. soc., n° 12, 2018, pp. 1037
et s.).

Nécessité de conclure un contrat de travail
Si la formation en milieu professionnel répond à la nécessité d'opérationnaliser la formation théorique acquise en centre de formation, elle poursuit globalement des objectifs juridiques, sociaux et
économiques.

L'opérationnalisation d'une formation aux objectifs
pluriels
■■Le comportement prosocial de l'entreprise
En embauchant un alternant (dont la productivité reste relative en
début de contrat) l'entreprise met en œuvre le principe du compagnonnage. Selon celui-ci, la « véritable » formation professionnelle
s'acquiert surtout dans l'entreprise, lieu de l'expérience concrète,
lieu de production en grandeur réelle, lieu de transmission. L'article 12 de la loi du 22 février 1851 disposait que « Le maître doit
enseigner à l'apprenti, progressivement et complètement, l'art, le
métier où la profession spéciale qui fait l'objet du contrat. Il lui
délivrera, à la fin de l'apprentissage, un congé d'acquit ou certificat
constatant l'exécution du contrat ».

Avant tout, l'article 8 disposait : « Le maître doit se conduire envers
l'apprenti en bon père de famille (...) ». Cette vision fut légitimée
par l'histoire : ce qu'il nous reste des civilisations passées, c'est ce
qu'elles ont bâti et rendu visible sinon permanent par un travail devenu invisible : le travail des ouvriers en est un fer de lance (v. Castera B. de., Le compagnonnage, 1988, « la culture ouvrière est une
culture sacrée »). Poussée à l'extrême, cette vision sacralisée invite
l'entreprise à se considérer comme une spécialiste du geste professionnel dotée de la prévalence à accompagner l'alternant dans son
parcours initiatique.
Au quotidien, l'embauche d'un alternant relève de motivations (souvent) autres que purement rationnelles, au sein
desquelles la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE)
possède une place privilégiée. Celle-ci n'est pas une simple
« boîte noire » à l'image du concept défendu par les économistes
libéraux. Elle n'est pas non plus un simple « contrat de société » à
l'affectio societatis souvent relatif, voire ineffectif, dans les sociétés de capitaux (SA, SAS, SCA notamment). L'entreprise est une
construction économique et sociale dont la réussite repose avant
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