Mémentos - Note de synthèse - 2e - 169

CHAPITRE 5 - Dossier corrigé - Le droit souple
167
toute hypothèse, si l'acte produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter
les intérêts du requérant, il sera requalifié en décision et deviendra, dans ces conditions,
attaquable. En outre, l'interprétation retenue par l'institution ne déploie d'effet contraignant
ni à l'égard des particuliers, ni du juge de l'Union, qui peut lui substituer sa propre
appréciation. Plus encore, le juge de l'Union a pu estimer « que les juges nationaux sont
tenus de prendre les recommandations en considération en vue de la solution des litiges
qui leur sont soumis, notamment lorsque celles-ci éclairent l'interprétation de dispositions
nationales prises dans le but d'assurer leur mise en œuvre, ou encore lorsqu'elles
ont pour objet de compléter les dispositions communautaires ayant un caractère
contraignant ». La Cour lie ainsi, dans le cadre de l'interprétation conforme, les juridictions
nationales, ne laissant aucun doute quant aux effets juridiques que déploient ces
normes. De telles conséquences doivent convaincre de la normativité de la soft law.
Concernant les communications d'orientation, les effets juridiques se révèlent plus
étendus encore. La précision des orientations et la circonstance que l'institution
s'engage à suivre la ligne de conduite qu'elle énonce contribuent manifestement à
l'opposabilité de ces actes. En dépit de leur caractère non contraignant, l'ambivalence
qu'ils entretiennent avec les actes normatifs, dans leur rédaction et leur contenu, favorise
la naissance d'attentes légitimes quant à leur application.
L'acte informel peut revêtir tout d'abord une « portée juridique indirecte » dans la mesure
où il a fait naître une confiance légitime dans le chef des particuliers quant à son application.
L'auteur de l'acte doit alors en principe suivre ses propres prescriptions. Il convient
néanmoins de nuancer cette portée au vu de la difficulté à réunir les critères imposés
par la Cour pour identifier la violation du principe de confiance légitime. Le juge exige,
premièrement, que l'acte en cause ait donné « des assurances précises, inconditionnelles
et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, [qui] doivent avoir été fournies
àl'intéressé par l'administration communautaire. Deuxièmement, que ces assurances
soient de nature à faire naître une attente légitime dans l'esprit de celui auquel elles
s'adressent. Troisièmement, que les assurances données soient conformes aux normes
applicables ». La première condition relative à une assurance précise et concordante fait
généralement défaut. Toutefois, la Cour a reconnu la possibilité pour un requérant de se
prévaloir d'une communication, qui, bien que non contraignante, avait pu faire naître
une attente légitime dans son application. Ainsi, dans l'arrêt AIUFASS, où les concurrents
d'une société attaquaient la décision par laquelle la Commission estimait compatible avec
les conditions de dérogation de l'ex-article 87 § 3, a) du Traité instituant la Communauté
européenne (Traité CE) l'aide projetée, le juge rappelle que, si la Commission dispose
d'un pouvoir discrétionnaire particulièrement important, elle doit néanmoins se
conformer aux règles indicatives qu'elle s'est elle-même imposées à l'égard de ce secteur.
Plus généralement, le juge considère, dans le sillon de l'affaire Archer, que les effets juridiques
de ces actes, « s'ils ne découlent pas d'une normativité propre », résultent de leur
adoption et de leur publication, lesquelles impliquent que leur auteur ne puisse se
départir de leurs orientations « sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant au titre
d'une violation des principes généraux du droit, tels que l'égalité de traitement, la
protection de la confiance légitime et la sécurité juridique ».
Or cette normativité « propre » a franchi un pas supplémentaire pour devenir celle
partagée par le droit contraignant, lorsque la Cour a considéré que les destinataires de
l'acte, en principe non contraignant, pouvaient néanmoins être liés par celui-ci. Elle a
ainsi jugé dans l'arrêt CIRFS qu'une discipline adoptée par la Commission dans le
Mémentos - Note de synthèse - 2e

Table des matières de la publication Mémentos - Note de synthèse - 2e
