Mémentos - Note de synthèse - 2e - 179

CHAPITRE 5 - Dossier corrigé - Le droit souple
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contrôle fort de l'entreprise de marché. On pourrait encore évoquer pêle-mêle les
nombreuses personnes privées auxquelles le Conseil d'État a reconnu le pouvoir
d'édicter des actes réglementaires administratifs : Fédération française de tennis de
table, Association communale de chasse agréée, Caisse de garantie des administrateurs
judiciaires et mandataires judiciaires, Compagnie Air France... Et s'il l'a fait, c'est pour
mieux les contrôler, les justiciables pouvant ainsi en contester la conformité aux normes
hiérarchiquement supérieures, devant le juge administratif. En réalité, ce double mouvement
de privatisation de l'élaboration de la norme, d'une part, et de renforcement du
contrôle, d'autre part, est observable dans tous les domaines dans lesquels des acteurs
privés ont acquis un pouvoir réglementaire. Si la figure témoigne à l'origine d'un changement
remarquable dans le processus d'édiction de la norme, il demeure que des
normes à la fois générales et obligatoires ne peuvent s'élaborer librement.
Mais il est d'autres normes émises par des acteurs privés qui obéissent à un schéma
différent car elles se présentent comme « souples ». Ces normes souples ont fleuri au
fil des deux dernières décennies dans les domaines les plus variés et sont restées assez
largement hors du contrôle de l'État : puisqu'elles n'imposent pas mais se contentent
de suggérer, le besoin d'encadrement paraît moindre. Plus récemment cependant, des
évolutions ont pu être observées, renouvelant l'intérêt attaché à l'étude de ces normes
privées. D'une part, elles se sont durcies. Alors qu'elles étaient souvent initialement de
simples propositions de conduite, elles sont désormais conçues comme obligatoires.
D'autre part, et comme une suite logique, certaines normes privées ont aujourd'hui un
champ d'application général, déployant leurs effets au-delà du cercle de leurs émetteurs
et de ceux qui ont décidé de se soumettre à son application. Elles sont ainsi susceptibles
de créer non seulement des droits au profit des tiers mais également des obligations à
leur charge - ou du moins telle paraît parfois être la volonté de leurs rédacteurs. Néanmoins
le phénomène est généralement subreptice. La norme se présente comme facultative,
revêtant l'habit d'une recommandation.
Et si ces normes sont à la fois obligatoires et d'application générale, on conçoit aisément
la proximité qu'elles entretiennent avec les règles étatiques. Voilà ce qui doit conduire à
s'interroger non pas directement sur la juridicité de ces instruments - ce débat peut
d'ailleurs paraître insoluble au vu des incertitudes qui entourent la notion même de
droit - mais sur leur légitimité et les garanties qui entourent leur édiction et leur application.
Deux corps de normes permettront d'illustrer notre propos : les recommandations
élaborées par l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité et le code AFEPMEDEF
de gouvernement d'entreprise.
* Document 17 : Noëlle Lenoir, « Lignes directrices, guides et autres
recommandations ou comment canaliser une prolifération de
normes génératrices d'insécurité juridique pour les entreprises », Le
Monde Du Droit, novembre 2020 (extrait).
La fragmentation du pouvoir réglementaire entre une multitude d'autorités
administratives indépendantes est source d'insécurité juridique
En principe, en vertu de l'article 21 de la Constitution, le pouvoir réglementaire est
réservé au Premier ministre qui assure l'exécution des lois et ne peut déléguer ce
pouvoir qu'aux ministres. Mais ce texte est devenu obsolète face à la fragmentation
d'un pouvoir réglementaire dispersé dans un nombre croissant d'autorités administratives
indépendantes (AAI). Cette fragmentation a été bénie par le Conseil constitutionnel dès

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