Professions immobilières - Responsabilité des constructeurs - 2e - 49

LE DROIT SPÉCIAL DE LA RESPONSABILITÉ DES CONSTRUCTEURS
a. Travaux neufs
56. Une lecture rapide des articles 1792 et suivants du Code civil risque de conduire le Lecteur
à comprendre que tout dépend du point de savoir si l'élément d'équipement est dissociable ou
indissociable. Ce n'est pas les cas. Qu'il soit dissociable ou indissociable, l'élément d'équipement
peut relever de la garantie décennale des constructeurs s'il rend l'ouvrage, dans lequel il est implanté,
impropre à sa destination ou l'affecte dans sa solidité. Là encore, le critère de la gravité
du dommage emporte tout. A contrario, les éléments d'équipement qui participent à l'esthétique
de la construction devraient être exclus73
. Il reste à rappeler que les éléments d'équipement relèvent,
s'agissant du droit spécial de la responsabilité des constructeurs, soit de la responsabilité
décennale soit de la garantie biennale de bon fonctionnement.
57. Relèvent, en premier lieu, de la responsabilité décennale des constructeurs, les dommages
qui affectent les éléments d'équipement de l'ouvrage au point de la rendre impropre à sa destination.
Ce sont les dommages les plus graves donc peu importe que l'élément d'équipement soit
dissociable ou non74
. Cette condition n'est pas posée par le texte. À ce principe, parfaitement dans
l'Esprit du Législateur de 1978, la jurisprudence répond pourtant assez mal. Par une interprétation
large de la notion d'impropriété à destination, la jurisprudence rend presque plus facilement
applicable, pour des éléments d'équipement, l'article 1792 du Code civil que l'article 1792-2. Les
désordres d'isolation phonique en sont une parfaite illustration75
.
58. Relèvent, en deuxième lieu, de la responsabilité décennale des constructeurs sur le fondement
de l'article 1792-2 du Code civil, les dommages qui affectent la solidité de l'élément d'équipement
de l'ouvrage mais seulement lorsque celui-ci est indissociable. Trois conditions cumulatives sont
à démontrer :
- le caractère indissociable de l'élément d'équipement, défini légalement comme l'élément d'équipement
dont le démontage ou le remplacement ne peut s'effectuer sans enlèvement de matière
de l'ouvrage ;
- l'atteinte à la solidité de l'élément d'équipement que le Lecteur ne confondra pas avec l'atteinte
à la solidité de l'ouvrage76
;
- le fait qu'il soit indissociable d'un ouvrage de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de
couvert.
Si ces trois conditions cumulatives77 ne sont pas réunies, le dommage est réparé sur le fondement
de la responsabilité biennale des constructeurs.
73 Pour exemple, un revêtement de sol dans une surface de vente de meubles Cass. 3e
n° 16-16637. Ou encore, pour un mur végétal, Cass. 3e
civ., 29 juin 2017,
civ., 18 févr. 2016, n° 15-10750.
74 Cass. 3e civ., 14 oct. 1992, n° 91-11628. Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui
retient qu'un faux plafond n'est pas un élément constitutif de l'immeuble, qu'il ne fait pas indissociablement
corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert, sans rechercher si les
désordres affectant cet élément d'équipement rendaient l'immeuble impropre à sa destination.
75 Cass. 3e
civ., 23 janv. 1991, n° 89-10489. Il appartient aux Juges du fond de rechercher si, nonobstant la
conformité aux normes réglementaires applicables, les désordres d'isolation phonique relatifs à la diffusion de
bruits aériens ne rendent pas l'immeuble impropre à sa destination.
76 CA Versailles, 23 juin 1995, n° 1995-045735.
77 Les trois conditions sont bien cumulativement à démontrer, au risque de cassation. V. par ex. Cass. 3e
civ.,
28 oct. 2003, n° 02-14589. Les Juges du fond ne peuvent retenir qu'une chape est dissociable de la structure
en se fondant sur les modalités de réparation, sans constater que sa dépose, son démontage ou son remplacement
peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière.
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