Droit en Poche - Le nouveau droit de l'environnement - 1re - 52

Les critiques adressées au principe
de précaution
Le principe de précaution fait l'objet de controverses récurrentes. Si ses partisans font valoir qu'il ne peut prévenir de manière efficace tous les types de risques, ce principe serait, selon ses
détracteurs, de nature à paralyser la recherche et le progrès technique. Il a été « dénoncé comme étant de nature à pervertir l'imputation de certaines responsabilités, à pénaliser les entreprises
dont la compétitivité se trouverait compromise par des excès de
réglementation, à faire obstacle à l'innovation, et dans les échanges
internationaux, à masquer des intérêts protectionnistes » (Philippe
Kourilsky, Geneviève Viney).
Dans son premier rapport, la Commission pour la libération de la
croissance française, présidée par Jacques Attali, a préconisé en
2008 de l'abroger « ou à défaut de limiter très strictement la portée de l'article 5 de la Charte de l'environnement ». « La constitutionnalisation du principe fige la réalité et constitue un obstacle à
la croissance : le législateur devrait pouvoir conserver une marge
de manœuvre pour définir des conditions précises d'application du
principe ».
Le rapport de Louis Gallois sur la compétitivité française, qui a été
remis au Gouvernement le 5 novembre 2012, a également critiqué
le principe de précaution. Il souligne que « la notion même de progrès technique est trop souvent remise en cause à travers une interprétation extensive - sinon abusive - du principe de précaution et
une description unilatérale des risques du progrès, et non plus de
ses potentialités ». Le rapport Gallois ajoute que « le principe de
précaution doit servir à la prévention ou à la réduction des risques,
non à paralyser la recherche ; il doit, au contraire, la stimuler ».
En 2013, la Commission « Innovation 2030 » présidée par Anne
Lauvergeon a suggéré quant à elle la création d'un «  principe
d'innovation » qui viendrait équilibrer le principe de précaution.
Le 27 mai 2014, le Sénat a d'ailleurs adopté en première lecture une
proposition de loi constitutionnelle visant à modifier la Charte de
l'environnement pour exprimer plus clairement que le principe de
précaution est aussi un principe d'innovation.
Par ailleurs, une résolution sur la mise en œuvre du principe de
précaution a été adoptée le 1er février 2012 par l'Assemblée nationale. Cette résolution, qui s'inquiétait d'une application d'un principe de précaution laissée à la responsabilité de la jurisprudence, a
notamment préconisé la mise en place d'une « procédure d'identification de l'émergence de nouveaux risques pour l'environnement,
la santé publique et la sécurité alimentaire ». Une proposition de
loi constitutionnelle destinée à retirer le principe de précaution
du « bloc de constitutionnalité » a aussi été déposée à l'Assemblée
nationale le 13 juin 2014.

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