Les Carrés Rouge - L'essentiel du droit du contentieux constitutionnel - 2e - 138

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L'ESSENTIEL DU DROIT DU CONTENTIEUX CONSTITUTIONNEL
ou différée -, il doit faire un autre choix : l'abrogation frappe-t-elle les situations passées, en cours
et/ou à venir ? Le Conseil peut donc effacer plus ou moins les effets de la loi abrogée, voire maintenir
ses effets pendant un certain temps.
■ La question de la date de l'abrogation
a) La publication et l'entrée en vigueur de la décision
En principe, les décisions du Conseil constitutionnel entrent en vigueur le jour de leur publication
et la censure prononcée à l'occasion de cette décision est applicable à ce moment. Or, le premier
pouvoir du Conseil en matière de modulation réside justement dans la capacité qu'il détient de
dissocier ces deux moments, c'est-à-dire de séparer la date de la publication et la date de
l'entrée en vigueur de la décision.
Ce report de l'entrée en vigueur emporte une conséquence importante : dans l'espace qui se crée
entre la date de la publication et la date de l'entrée en vigueur de l'abrogation, la loi ancienne
continue de produire des effets dans toutes ses dispositions. Cela entraîne une situation paradoxale
puisqu'une disposition déclarée inconstitutionnelle par le Conseil continue tout de même
de régir les phénomènes juridiques qui prennent naissance sur son fondement. En réalité, cette
situation s'explique par le fait que, lorsqu'il reporte l'entrée en vigueur de l'abrogation, le Conseil
juge qu'une application immédiate de la censure aurait des conséquences bien plus néfastes que
le maintien temporaire de l'inconstitutionnalité. Il doit donc déposer dans la balance de son jugement
deux considérations parfaitement opposées et choisir, au cas par cas, de reporter ou non sa
décision d'abrogation. Jugement évidemment très subjectif...
Bien entendu, on va le voir, le Conseil peut toujours réduire l'impact de cette inconstitutionnalité
« maintenue » en isolant certains actes, par exemple les contrats, ce qui permet en quelque sorte
de limiter les effets indésirables de la censure différée.
Il faut également souligner que ce report de l'entrée en vigueur ne concerne pas seulement les
décisions d'abrogation. Le Conseil peut en effet reporter l'entrée en vigueur des réserves d'interprétation,
sans même censurer la disposition à l'origine du litige. Le cas se présente pour la
première fois dans la décision DC du 23 janvier 2014 (nº2013-687DC). Dans cette affaire, le juge
estime que la réserve est applicable « à compter du prochain renouvellement général des conseils
municipaux », en précisant dans le dispositif que la loi contrôlée est « conforme à la Constitution
sous la réserve énoncée au considérant nº 64 ». En réalité, le Conseil avait déjà reporté dans le
temps une réserve, mais en visant une situation particulière (par exemple des contrats en cours),
ce qui revient à moduler les effets de la réserve, et non pas son entrée en vigueur.

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