Les Carrés Rouge - L'essentiel du droit du contentieux constitutionnel - 2e - 89

CHAPITRE 3 - Le contrôle a posteriori
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En décidant de demander à la Cour de Luxembourg si la rédaction de la décision-cadre doit être
interprétée comme excluant la possibilité d'un recours contre une décision d'extension d'un
mandat d'arrêt européen, le Conseil bascule du côtoiement des ordres juridiques constitutionnel
et européen à leur enchâssement ; et, davantage même, à la subordination du premier au
second, puisque l'exercice du contrôle de constitutionnalité est, en effet, soumis à la décision
de Luxembourg. Tout dépend, dès lors, de la position de la CJUE :
- soit elle juge que les articles 27 et 28 de la décision-cadre excluent la possibilité d'un recours, et
le Conseil devra censurer l'alinéa 4 de l'article 695-46 du Code de procédure pénale au motif
qu'il est manifestement incompatible avec l'objet de cette décision-cadre ;
- soit elle juge que ces articles ne l'excluent pas, et le Conseil retrouve une liberté de décision ;
il peut ainsi :
* soit censurer l'alinéa 4 au motif qu'il porte atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif,
* soit considérer, en s'inspirant de la jurisprudence Dame Lamotte, que la disposition législative
« sans recours possible » ne saurait avoir exclu le recours en cassation pour excès de pouvoir,
qui est ouvert même sans texte afin d'assurer le respect du principe de légalité.
Pour le dire un peu brutalement, le Conseil n'est plus maître de son jugement : il dépend du jugement
de la Cour de justice de l'Union européenne. Évidemment, le degré de subordination
dépendra de l'usage que fera le Conseil de la théorie de l'acte clair permettant au juge de
décider souverainement qu'il n'y a pas de difficultés d'interprétation, et donc nulle obligation de
transmettre une question préjudicielle à la Cour de Luxembourg. Après avoir qualifié très facilement
les actes soumis à leur contrôle d'« actes clairs » pour préserver leur liberté de jugement, les
juges voient davantage l'obscurité (!) et transmettent des questions préjudicielles plus régulièrement.
Ainsi en l'espèce, où l'application de la théorie de l'acte clair n'aurait pas été incongrue.
Comme le contentieux constitutionnel est, depuis l'introduction de la QPC, un moment du
contentieux ordinaire (ce dernier est en effet suspendu à la décision du Conseil), le contentieux
européen devient à son tour, avec la décision du 4 avril 2013 (nº2013-314PQPC), un moment du
contentieux constitutionnel. Il s'agit d'ailleurs d'un moment tout aussi important, puisque la décision
de la Cour de Luxembourg commande, là également, la suite du contrôle de constitutionnalité.
Un système juridictionnel intégré se met ainsi en place :
- une affaire contentieuse naît devant le juge judiciaire français ;
- elle se poursuit devant le juge constitutionnel français par l'introduction d'une QPC ;
- elle se prolonge devant le juge européen par le renvoi d'une question préjudicielle ;
- la décision rendue par le juge européen « redescend » enfin vers les juges français, en diffusant
ses effets sur le contrôle de constitutionnalité et, par ricochet, sur le jugement au fond.
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