Hors collection - Entreprises patrimoniales et droit des sociétés - 133

CHAPITRE 4 - LA GESTION DES FLUX FINANCIERS
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qu'ils avaient créée, d'un terrain et de l'immeuble constituant le principal actif de la SCI à un prix très
inférieur à sa valeur réelle34
.
309. Abus de biens sociaux. La surévaluation peut, quant à elle, être sanctionnée sur le fondement de
l'abus de biens sociaux. Il s'agit, rappelons-le, pour des dirigeants, de faire de mauvaise foi, des biens de
la société, « un usage qu'ils savent contraire aux intérêts de la société, à des fins personnelles ou pour
favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement
» (C. com., art. L. 241-3 et L. 242-6).
Le délit a ainsi été caractérisé dans le fait, pour un président, d'avoir fait acquérir par la société des
terrains à un prix excessif pour favoriser l'entreprise qui les a vendus, dans laquelle il avait des intérêts
personnels35
. Une telle infraction a également été constatée dans les relations existant dans le couple
SCI-société d'exploitation, comportant les mêmes associés. Pour financer l'amortissement de
l'emprunt contracté par la SCI, il peut être tentant de fixer, dans le bail, un loyer sur-évalué. Un
festival de sanctions peut alors frapper cette violation de l'intérêt social de la société commerciale :
abus de majorité, responsabilité civile, acte anormal de gestion, mais aussi abus de biens sociaux. Ce
délit a ainsi été caractérisé à l'encontre de gérants de SARL ayant versé à une SCI dont ils étaient
associés, un sur-loyer sous forme d'acomptes injustifiés36
.
310. Les mesures de précaution. Les opérations patrimoniales entre le dirigeant, les associés et les
sociétés contrôles exposées en cas d'abus à nombre de sanctions, appellent une vigilance par le
respect de plusieurs mesures de précautions en matière juridique et fiscale.
Dans le cadre spécifique de la donation d'une entreprise, on peut citer la demande d'un rescrit
valeur37
. La mesure permet de faire valider en amont, par l'administration fiscale, la valeur du bien
des articles
transmis et d'éviter ainsi qu'un contrôle fiscal ultérieur ne remette en cause la valorisation retenue.
Lorsque les redressements sur la valeur sont opérés, sur le fondement de l'abus de droit38
L. 64 et L. 64 A du LPF, le contribuable a la possibilité de saisir le comité de l'abus de droit. Ce
comité analyse la situation puis émet un avis sur le litige. Cette procédure constitue une garantie au
profit du contribuable et la charge de la preuve reposera toujours sur le contribuable, quelle que soit
la position du Comité.
311. Ressources du droit commun. Au-delà du droit fiscal, il existe également des ressources dans le
droit commun pour sécuriser les opérations. En premier lieu, le droit des sociétés comporte son propre
système de prévention des conflits d'intérêts. C'est le régime des conventions réglementées qui
s'applique à toutes les sociétés, à l'exception de la SNC. Ainsi, le bail entre le président bailleur et la
société anonyme où il siège sera soumis à l'autorisation du conseil d'administration et à l'onction du
commissaire aux comptes (C. com., art. L. 225-38). Il en sera de même du bail conclu entre une
SARL et une société civile comprenant des associés communs (C. com., art. L. 223-19 et L. 612-5).
Dans une société anonyme, le contrôle est particulièrement renforcé, dans les 2 ans de son immatriculation,
en cas d'acquisition d'un bien appartenant à un de ses actionnaires et dont la valeur est au
moins égale à 10% du capital social (C. com., art. L. 225-101). Un commissaire ad hoc doit être
désigné en justice et l'assemblée statue, à peine de nullité, sur la valorisation. Dans l'objectif de
34. Cass. com., 24 mai 2016, nº 14-28121.
35. Cass. crim., 16 déc. 1975 : Bull. crim., nº 279.
36. Cass. crim., 28 janv. 2004, nº 02-8809.
37. BOI-SJ-RES-10-20-20-90, 12 sept. 2012.
38. Cass. com., 4 mars 2020, nº 17-31642.
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