Mémentos - Droit commercial - 4e - 197

CHAPITRE 17 - Lesrèglesapplicablesau bail commercial
197
quelle que soit l'ampleur de la modification de la valeur locative. Il en va de même en
cas de renouvellement du bail.
504. À défaut d'autorisation préalable, la déspécialisation partielle expose le preneur à
des sanctions variables selon la gravité du manquement. Il peut être condamné à
verser des dommages et intérêts au bailleur pour le préjudice subi, se voir refuser le
renouvellement du bail ou encore voir le bail résilié par le juge si la modification de la
destination des lieux est suffisamment grave ou par l'effet d'une clause résolutoire
insérée au bail (dès lors que cette clause vise la déspécialisation partielle réalisée sans
autorisation préalable).
505. Une telle déspécialisation peut évidemment porter atteinte aux tiers. On songe,
par exemple, au commerçant qui exerce déjà dans l'immeuble l'activité que le locataire
veut adjoindre. Pour autant, l'extension demeure possible en ce cas, car la loi ne
prévoit aucune restriction. Toute indemnisation du tiers est d'ailleurs exclue en
l'absence de faute du locataire ou du bailleur, puisque le droit du locataire à la déspécialisation
s'impose au bailleur. Dans le cas où un bailleur aurait plusieurs locataires, les
clauses de non-concurrence ou d'exclusivité introduites dans un bail pourraient rester
lettre morte. C'est ainsi que la troisième chambre civile de la Cour de cassation a cassé
un arrêt d'appel pour violation des articles L. 145-15 et L. 145-47 du Code de
commerce, reprochant aux juges du fond d'avoir rejeté la demande de déspécialisation
partielle en se fondant « non sur le caractère objectivement connexe ou complémentaire
des activités dont l'adjonction était demandée, mais exclusivement sur la clause
de non-concurrence figurant au bail liant les parties, alors qu'une telle clause ne peut
avoir pour effet d'interdire au preneur de solliciter la déspécialisation partielle »17
.
2) La déspécialisation totale
506. Le locataire peut demander à son bailleur l'autorisation d'exercer une activité
différente de celle convenue, pour l'adjoindre ou la substituer à cette dernière
(C. com., art. L. 145-48). Il s'agit d'un changement total d'activité ou de l'ajout à l'activité
existante d'une nouvelle activité, laquelle n'est ni connexe, ni complémentaire.
507. La déspécialisation totale suppose soit l'accord du bailleur, soit l'autorisation du
juge. La demande de déspécialisation totale doit être notifiée, par acte extrajudiciaire
(acte d'huissier) ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (depuis
la loi nº 2015-990 du 6 août 2015 ; C. com., art. L. 145-49, al. 1), au bailleur et aux
créanciers inscrits sur le fonds de commerce.
Cette demande doit également être dénoncée, en la même forme, aux créanciers
inscrits sur le fonds de commerce. La raison en est que le fonds de commerce risque de
disparaître. Ces créanciers peuvent exiger que le changement d'activité soit subordonné
à des conditions de nature à sauvegarder leurs intérêts (C. com., art. L. 145-49, al. 1 in
fine).
Dans le mois de la notification de la demande, le bailleur doit aviser, dans la même
forme, les locataires auxquels il a consenti une clause d'exclusivité pour la même activité
--
17. Cass. 3e
civ., 15 févr. 2012, nº 11-17213.

Mémentos - Droit commercial - 4e

Table des matières de la publication Mémentos - Droit commercial - 4e