Mémentos - Droit du contentieux administratif - 4e - 209

CHAPITRE 14 - Les principes généraux du procès administratif
209
689. Le rapporteur public est un membre de la juridiction, un magistrat. Il contribue à
l'élaboration de la solution qui sera apportée au litige. Mais il ne participe ni au délibéré
ni à la rédaction de la décision finale.
690. Le « principe du contradictoire, qui tend à assurer l'égalité des parties devant le
juge »54
ne lui est pas applicable. En effet, les conclusions du rapporteur public sont
prononcées au cours de l'audience publique, une fois l'instruction close. Elles prennent
une forme orale et appartiennent à leur auteur (en pratique, les rapporteurs publics
rédigent leurs conclusions par écrit et les lisent au cours de l'audience publique). Elles
ne sont communiquées aux parties ni avant l'audience ni même après, sauf en cas de
demande des parties après l'audience, à la discrétion du rapporteur public (elles relèvent
de sa propriété intellectuelle). Le travail du rapporteur public n'est toutefois pas
totalement mis à l'écart de tout débat puisque les parties peuvent présenter d'une
part, des observations en réponse à ses conclusions au cours de l'audience publique,
et, d'autre part, une note en délibéré.
691. Les conclusions et l'opinion du rapporteur public constituent une proposition à
destination de la formation de jugement qui n'est aucunement liée par celles-ci. Il
doit proposer une solution motivée et ne peut se borner à évoquer les alternatives
offertes à la formation de jugement ou à s'en rapporter à la sagesse de celle-ci (il
n'est toutefois pas tenu d'aborder toutes les questions soulevées par le litige). Les
conclusions ont pour finalité d'éclairer la formation de jugement, notamment :
- en creusant les questions complexes d'une affaire ;
- en énonçant l'alternative qui s'offre à elle ;
- en rappelant le droit applicable.
692. Elles sont ainsi tout aussi utiles aux parties en leur apportant ces mêmes
éléments, ainsi qu'un aperçu du raisonnement susceptible d'être suivi par la formation
de jugement ; en effet, la motivation du jugement (v. infra, nº 799) ne porte que sur la
solution retenue, et non sur les solutions envisagées mais écartées.
693. Elles jouent également parfois un rôle doctrinal (lequel justifie devant le Conseil
d'État le régime dérogatoire quant à la présence au délibéré du rapporteur public -
art. R. 733-3)55
.
694. L'absence du rapporteur public au délibéré (v. supra, nº 688) est une
conséquence de l'application de l'article 6, § 1 de la CEDH, et plus précisément de la
théorie des apparences : il a été considéré qu'un justiciable pouvait légitimement être
heurté par la participation - et même la simple présence - au délibéré d'un magistrat
qui, au cours de l'audience, a pris publiquement la parole afin de convaincre la
formation de jugement de ne pas faire droit à sa demande (requérant) ou, au
contraire, de donner satisfaction au requérant (défendeur)56
. Cette apparence de
partialité était en outre renforcée par le nom du rapporteur public, qui - on l'avu -
était auparavant de « commissaire du gouvernement ». Une réforme de la procédure
--
54. Gervaise, préc.
55. Monat A., « Le rapporteur public au Conseil d'État : réflexions sur une légende contentieuse », RFDA
2021, p. 926.
56. CEDH, 7 juin 2001, nº 39594‑98, Kress.
Mémentos - Droit du contentieux administratif - 4e

Table des matières de la publication Mémentos - Droit du contentieux administratif - 4e
