Mémentos - Droit social international et européen - 2e - 133

CHAPITRE 12 - Normes du Conseil de l'Europe
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morale »136
. Partant, le droit à la liberté d'expression s'applique aux relations contracque
du
tuelles de droit privé, notamment aux relations de travail entre salarié et employeur. La
liberté d'expression garantit d'ailleurs aussi bien les droits du premier137
second138. Dans l'affaire Fuentes Bobo du 29 février 2000139
, un travailleur exerce ses
fonctions au sein d'un organisme public de radiodiffusion espagnol. Il avait d'abord
cosigné un article paru dans un quotidien espagnol, où il critiquait certaines pratiques
de gestion au sein de l'organisme public de radiodiffusion espagnol. Fuentes Bobo
avait par la suite formulé d'autres critiques à l'encontre de certains directeurs de
stations de radio à l'occasion de deux émissions radiophoniques. Ces propos avaient
entraîné des poursuites disciplinaires, qui avaient abouti au licenciement du requérant.
Dans cette affaire, la CEDH conclut à la violation de l'article 10 de la Convention européenne
des droits de l'Homme. Cette décision comporte deux apports intéressants :
- premièrement, la Convention européenne des droits de l'Homme a un effet horizontal,
c'est-à-dire un effet entre personnes privées, ce qui n'était pas évident
puisque normalement la Convention européenne des droits de l'Homme impose
des obligations à l'égard des États parties à la convention (encore que la personne
licenciée travaillait pour un organisme public de radiodiffusion) ;
- deuxièmement, afin de faire respecter effectivement la liberté d'expression, l'État -
en particulier le juge appelé à trancher le litige - ne peut pas simplement s'abstenir
- c'est-à-dire ne pas réglementer de manière trop restrictive l'exercice de la liberté
d'expression -, mais il est également tenu de garantir sa mise en œuvre.
On retrouve ici le rôle actif de l'État. En ce sens, l'État est soumis à l'obligation positive
de protéger le droit à la liberté d'expression, y compris contre des atteintes provenant de
personnes privées140
.
287. Critique syndicale. L'article 10 de la Convention EDH vise aussi les relations
collectives de travail. Dans une affaire Palomo Sanchez141
, plusieurs employés d'une
entreprise de boulangerie industrielle située à Barcelone étaient, depuis quelques
années, en conflit avec leur direction. Pour réagir, ils ont constitué une organisation
syndicale autonome. Ces salariés considèrent que la direction et certains membres du
personnel s'opposaient, par le biais de différentes manœuvres, à leurs actions
syndicales. Effectivement, certains membres du personnel avaient témoigné en faveur
de la direction de l'entreprise. Pour exprimer leur opinion et leur mécontentement, ils
rédigent un bulletin d'information dans lequel figure une caricature - sexuellement
explicite - du directeur des ressources humaines assis derrière un bureau sous lequel
se trouvait une personne à quatre pattes142
. De plus, à l'intérieur du bulletin, deux
articles exprimaient en des « termes rudes et grossiers » une critique de la direction.
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136.CEDH, Autronic AG, § 47 ; v. JCl. Europe traité, fasc. 6522, nº 15.
137.Pour une hypothèse de recrutement d'un professeur par une université catholique, CEDH, 2e
20 oct. 2009, nº 39128/05, Lombardi Vallauri c/ Italie.
sect.,
138.À propos de la liberté d'expression de l'employeur, CEDH, 25 mars 2021, nº 1864/18, Matalas
c/Grèce.
139.CEDH, 4e sect., 29 févr. 2000, nº 39293/98, Fuentes Bobo c/ Espagne ; Cass. soc., 9 mars 2011, nº 0942150,
FS-P+B, Société Radio France internationale (RFI) c/ Menargues.
140.CEDH, 4e sect., 29 févr. 2000, préc., § 38.
141.CEDH, gde ch., 12 sept. 2011, nº 28995/06, Palomo Sánchez et al. c/ Espagne.
142.« [...] dos tourné et, à côté, deux autres employés de la société, qui contemplaient la scène et attendaient
leur tour pour occuper la place du premier et satisfaire sexuellement le directeur ».

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