En poche - Histoire des idées politiques - 2e - 16

LE HAUT MOYEN ÂGE : UNE MATURATION DES POUVOIRS
En 751, le pouvoir politique est encore dépendant du spirituel comme
l'atteste la demande faite au pape par Pépin le Bref (714/768) de légitimer
un coup d'État contre le dernier des Mérovingiens. Son fils, Charlemagne
(742/814), cherche quant à lui à revendiquer l'autonomie de
son pouvoir face à l'Église. Il ne se conçoit pas comme un auxiliaire
de la papauté, mais comme un véritable prophète de Dieu. Il est un
roi-prêtre (« rex et sacerdos ») et doit sa couronne impérial à Dieu luimême,
le pape n'ayant été qu'un agent d'exécution dans la procédure
du sacre de l'an 800. La fermeté du pouvoir politique de cette période
ne traduit pas un renversement de domination mais tient au caractère
d'un empereur fort face à un pape plus timoré.
Dès le règne suivant, Louis le Pieux (778/840) limite lui-même son
pouvoir face à celui de l'Église en se soumettant à ses directives. La
faiblesse relative de l'empereur amène l'Église à administrer l'Empire.
Incapable de résoudre les crises politiques de son temps, le souverain
est amené à faire publiquement pénitence sur ordre du pouvoir
ecclésiastique : c'est la pénitence de Soissons en 831 qui marque
l'emprise du spirituel sur le temporel.
Alors que Charlemagne avait marqué la suprématie du politique, la
division de ses successeurs sera favorable, d'abord aux évêques, au
pape ensuite. Ce dernier apparaît désormais comme l'homme fort de
l'Europe occidentale et ne sera concurrencé qu'au siècle suivant avec
l'avènement de la dynastie ottonienne, restaurateur de l'idée impériale
en 962.
LA LUTTE POUR LE DOMINIUM MUNDI
À côté du pouvoir politique qui relève la tête avec le Saint Empire
romain germanique des Otton, l'Église doit affronter des désordres
internes qui la fragilisent. Au XIe
siècle, la décrépitude morale frappe le
clergé : la pratique du nicolaïsme se développe (mariage des prêtres)
tandis que celle de la simonie (vente des biens spirituels) contribue à
mettre l'Église en péril.
En 1075, l'énergie du pape Grégoire VII (1015/1085) vient rétablir
l'ordre dans les institutions ecclésiastiques. La réforme grégorienne,
dont l'acte le plus emblématique est la publication du Dictatus papae,
affermit l'autorité de l'Église qui revendique sa supériorité sur les
princes et la possibilité de déposer les empereurs. Pendant les deux
siècles suivants, l'Église et l'Empire s'affrontent autour de la prétention
à la domination universelle (le dominium mundi). La papauté reprend
à son compte la théorie des deux glaives de Bernard de Clairvaux
(1091/1153) pour appuyer sa position : « Le glaive spirituel et le glaive
matériel appartiennent l'un et l'autre à l'Église ; Mais celui-ci doit être
tiré par l'Église et celui-là pour l'Église, l'un est dans les mains des
La naissance de la pensée occidentale chrétienne
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