Professions immobilières - L'assurance construction - 2e - 143

LES ASSURANCES OBLIGATOIRES
143. Le cas est suffisamment rare pour être souligné. La tendance est, néanmoins, plutôt inverse.
Cass. 3e
civ., 19 sept. 2019, n° 18-16986
En l'espèce, une SCI entreprend la rénovation d'un immeuble qui lui appartient
afin de transformer une ferme en appartements locatifs. Les différents lots sont
dévolus par corps d'états séparés. Les travaux sont terminés le 15 janvier 2008
et la déclaration d'achèvement est déposée dans la foulée, le 26 janvier 2008.
Aucun procès-verbal de réception n'est signé. Le titulaire du lot charpente-couverture
assigne en paiement du solde de son marché. Le maître d'ouvrage expose,
à titre reconventionnel, que l'ouvrage serait affecté de diverses malfaçons
et désordres et obtient, devant le juge des référés, une mesure d'expertise.
L'expert dépose un rapport dans lequel il conclut à la non-conformité du bâtiment
à la norme parasismique applicable. Le maître d'ouvrage saisit le juge
du fond pour obtenir la condamnation des locateurs d'ouvrage ainsi que leur
assureur de responsabilité civile décennale à mettre l'ouvrage en conformité.
Après avoir estimé que les travaux avaient été tacitement réceptionnés, les premiers
juges ont considéré que les non-conformités aux normes parasismiques
constituent un désordre de nature décennale en ce qu'elles portent atteinte à
la solidité de l'ouvrage. L'assureur décennal du maître d'œuvre, condamné à
garantir, interjette appel du jugement. La Cour d'appel de Chambéry, dans un
arrêt rendu le 27 février 2018 (n° 16/00496) confirme la décision entreprise
sur le caractère décennal du désordre. Après avoir relevé qu'il serait de « jurisprudence
constante » (sic) que le non-respect des normes parasismiques « applicables
» (sic) constitue « en lui-même » (sic) un dommage qui compromet
la solidité de l'ouvrage et engage la responsabilité décennale du constructeur,
les conseillers s'interrogent, néanmoins, sur les normes qui devaient être éventuellement
respectées tout en précisant qu'il convient de se placer à la date du
permis de construire. Ils en déduisent que les travaux pris en litige ont apporté
des modifications importantes à la structure du bâtiment existant, ce qui aurait
dû conduire les constructeurs à respecter les normes parasismiques.
À l'appui du pourvoi formé par les assureurs, il est prétendu qu'en l'espèce, les
travaux entrepris sont en dehors du champ d'application de la réglementation
parasismique applicable à l'époque.
La Haute juridiction rejette le pourvoi en reprenant largement la motivation des
juges d'appel : « Mais attendu qu'ayant relevé que le décret du 14 mai 1991,
modifié par celui du 13 septembre 2000, rendait les normes parasismiques applicables
aux modifications importantes des structures des bâtiments existants
et constaté que les travaux réalisés par la SCI avaient apportés de telles modifications,
la cour d'appel, qui en a exactement déduit que ces normes devaient
s'appliquer, a légalement justifié sa décision ». Aucune référence n'est faite à
l'absence de matérialité d'un dommage, pas plus qu'au dommage futur ou à la
qualité des intervenants à l'opération de construction. La gravité des dommages
consécutifs à un séisme justifie l'extension du champ d'application rationae
materiae de la responsabilité des constructeurs.
iii) L'atteinte à la sécurité des personnes
144. Pendant longtemps, la jurisprudence s'est servie de la notion d'impropriété à la destination
de l'ouvrage pour faire entrer dans le champ d'application de la responsabilité décennale des
constructeurs les cas d'atteinte à la sécurité. Certains ont même parlé d'impropriété-dangerosité.
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