Professions immobilières - L'assurance construction - 2e - 7

Préface
L'assurance construction est sans nul doute l'une des spécialités les plus singulières du secteur
de l'assurance. Son actuel régime fut introduit en 1978 par l'emblématique loi Spinetta qui, tout
en renforçant la responsabilité des constructeurs, édifia un système original à l'effet d'en couvrir
les conséquences financières. Ce système dit « à double détente » combine deux assurances obligatoires
: la première, souscrite par le maître d'ouvrage, doit intervenir avant toute recherche de
responsabilité afin de préfinancer rapidement la réparation des désordres ; la seconde, exigée du
constructeur et de certains fabricants et négociants, garantit la responsabilité décennale que ces
professionnels encourent de plein droit.
Cette combinaison, qui est cependant loin d'épuiser tous les ressorts de l'assurance construction,
soulève de redoutables interrogations dont se nourrit un épais contentieux. Compte tenu de ses
enjeux, ce contentieux franchit fréquemment les portes de la Cour de cassation, spécialement sa
troisième Chambre civile, juge naturel de la matière. Au fil des décennies, la jurisprudence est ainsi
devenue une source prépondérante du droit de l'assurance construction, marquant un peu plus sa
spécificité.
Juridique, cette spécificité est également technique puisque l'assurance construction est gérée en
capitalisation, là où les autres assurances de dommages le sont par répartition. Un particularisme
qui n'est pas étranger aux nombreuses liquidations d'assureurs européens venus couvrir en libre
prestation de services (LPS) des risques construction situés en France. De taille modeste, ces assureurs
ignorent bien souvent les subtilités du dispositif national. Certes, ils peuvent compter sur
les compétences de leurs apporteurs d'affaires pour définir les garanties, sélectionner les risques
et gérer les sinistres. En revanche, leurs superviseurs, chargés de les agréer et de les contrôler,
ne peuvent compter sur des normes prudentielles adaptées à l'assurance construction dans sa
version française. Or, en l'absence d'une gestion par capitalisation et d'un provisionnement idoine,
comment vérifier que l'assureur évalue avec prudence les sinistres qui pourraient se manifester
pendant la période décennale d'exposition au risque ? De superviseurs négligents en provisions
insuffisantes, les défaillances d'assureurs opérant en LPS se sont ainsi multipliées, plaçant les
assurés concernés dans une situation pour le moins délicate.
Au fond, l'assurance construction est un « monde à part », où la technicité le dispute à la complexité.
Ces traits caractéristiques rendent alors d'autant plus difficile une présentation didactique
de la matière. C'est pourtant cette difficulté que Juliette Mel surmonte brillamment avec le présent
ouvrage. Par des développements concis qu'elle éclaire méthodiquement de données concrètes,
l'auteur accompagne le lecteur tout au long de ses déambulations dans un domaine qui, peu à peu,
lui devient pleinement familier. Avocat et enseignante, Juliette Mel met ainsi à profit du plus grand
nombre son expertise et son expérience en assurance construction.
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