60 L'ESSENTIEL DE L'INTRODUCTION HISTORIQUE AU DROIT accessoire des contrats pour en confirmer la valeur en un temps où le formalisme préside à la conclusion des conventions et où la justice est dotée de peu de moyens pour imposer le respect de la parole donnée. En justice également, le sacré s'immisce dans les procédures par le biais des ordalies qui corroborent les faits dont la preuve est difficile à rapporter par l'intervention présumée de Dieu. Qu'il s'agisse d'ordalie unilatérale (par le fer rouge, par l'eau froide) ou d'ordalie bilatérale comme le duel judiciaire, l'intervention divine distingue le coupable de l'innocent (plaie en voie de guérison pour le fer rouge, immersion durable de l'innocent dans l'eau, succès du duel judiciaire entre les parties). Enfin, tout un pan de la vie sociale entre dans les compétences des tribunaux d'Église et le serment comme l'ensemble des faits rattachés à un sacrement (le mariage) ou à une institution religieuse leur permettent de développer leurs propres règles qui s'ajoutent aux coutumes. b) Le débordement du droit privé sur le droit public La distinction du droit public faite à la période romaine s'efface avec le dépérissement de l'État. Les relations de nature contractuelle entre les individus rendent le droit public inutile et le droit privé indispensable pour régir les rapports des hommes entre eux et dans leur relation à la terre. L'apparition des principautés territoriales et des comtés autonomes a eu pour effet de reproduire « en petit » le mode d'exercice du pouvoir des institutions antérieures. C'est surtout l'apparition des seigneuries à partir de l'an mil qui dénature les prérogatives de droit public en les transformant en droits patrimoniaux, attachés non plus à une institution mais incarnés dans la personne qui les exerce et peut les aliéner librement comme un bien privé. Cette appropriation privée échappe définitivement à l'expression d'un pouvoir étatique. Elle ne fait que prolonger une évolution amorcée depuis la mise en place des castra au V e siècle et elle rejoint la tradition de la conception patrimoniale du pouvoir telle qu'elle s'est manifestée depuis les Mérovingiens. La frontière entre ce qui relève du public et du privé se brouille encore par la superposition sur un même territoire des droits fonciers du seigneur et de son pouvoir de ban et l'assimilation dans un premier temps des coutumes aux prélèvements fiscaux du seigneur en témoigne. Un droit nouveau, reflet des équilibres qui s'établissent entre chefs et population et englobant l'activité publique dans son champ d'élaboration, est en gestation par le biais du phénomène coutumier.