En poche - Régimes des libertés et droits fondamentaux - 5e - 21

du pluralisme des quotidiens d'information politique et générale (Cons.
const., 10-11 oct. 1984, n° 84-181 DC). La liberté d'expression protège
tant le fait d'émettre des informations et des idées que celui de les
recevoir.
Une protection étendue
La libre expression est garantie sous toutes ses formes, qu'elle soit
orale, écrite ou en images. Il peut s'agir d'informations, d'idées,
d'une expression artistique, et même d'actes militants délictueux
(qui peuvent échapper à une condamnation pénale si celle-ci constitue
une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression (Cass. crim.,
22 sept. 2021, n° 20-80489 à propos du décrochage du portrait officiel
du président de la République pour alerter sur l'urgence climatique et
l'inertie des pouvoirs publics). La protection vaut « pour les informations
ou idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou
indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent
l'État ou une fraction quelconque de la population » (CEDH,
7 déc. 1976, n° 5493/72, Handyside c/ Royaume-Uni).
Avec la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, la France a rompu
avec le contrôle préalable et la censure pour établir le principe de liberté
et sanctionner a posteriori les seuls abus. Le régime répressif alors mis
en place et conservé depuis s'ordonne autour de quatre axes :
- il exclut le régime d'autorisation, sauf exception pour le cinéma
(visa d'exploitation) ;
- il fixe un catalogue d'incriminations parmi lesquelles on trouve la
provocation (art. 23), la publication de fausses nouvelles (art. 28),
la diffamation et l'injure (art. 29), la contestation de l'existence des
crimes contre l'humanité (art. 24 bis introduit par la loi 13 juill. 1990) ;
- il établit un système principalement articulé autour de l'identification
et de la responsabilité pénale des directeurs de publication ;
- il institue des règles procédurales spécifiques afin de limiter les
actions judiciaires : délai de prescription raccourci à trois mois,
plainte de la victime préalable au déclenchement de poursuites par
le parquet, interdiction de la détention provisoire, strict encadrement
des perquisitions... La loi de 1881 prévoit aussi un droit de réponse
à toute personne désignée dans un média (art. 13) et l'exceptio veritatis
afin de faire obstacle à une action en diffamation (art. 35).
Des limites encadrées
Sous le regard du juge qui opère un strict contrôle (de la nécessité et de
la proportionnalité par rapport à l'objectif poursuivi), des limites peuvent
être apportées à la liberté d'expression afin de préserver les droits d'autrui
ou en considération de l'intérêt général. Au titre des premières, figurent
en droit interne les délits d'injure et de diffamation et, jusqu'à son abrogation
par la loi du 5 août 2013 (à la suite de la condamnation de la France
par la CEDH, 14 mars 2013, n° 26118/10, Eon c/ France), le délit d'offense
au chef de l'État. La liberté d'expression doit aussi être conciliée avec
le droit au respect de la vie privée, étant entendu que, dans la jurisprudence
strasbourgeoise, la marge d'appréciation déjà réduite consentie
aux États est quasiment anéantie lorsque l'expression porte sur un débat
d'intérêt général (CEDH, 10 nov. 2015, n° 40454/07, Hachette Filippachi
c/ France). Au titre des secondes se trouvent l'interdiction de la provo20
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