En poche - Régimes des libertés et droits fondamentaux - 5e - 7

du Conseil de l'Europe sont plus (Pays-Bas, Royaume-Uni) ou moins
libéraux (Malte, Pologne). Aux yeux de la Cour, l'article 2 ne s'oppose
pas à la légalisation de l'avortement, mais n'oblige pas non plus les
États - qui disposent d'une large marge d'appréciation - à accorder un
tel droit aux femmes (CEDH, 16 déc. 2010, n° 25579/05, ABC c/ Irlande).
Tout au plus vérifie-t-elle que les États qui reconnaissent ce droit dans les
conditions de leur choix en assurent l'effectivité (CEDH, 20 mars 2007,
n° 5410/03, Tysiac c/ Pologne) et que ceux qui s'y opposent n'entravent
pas la diffusion d'informations sur les possibilités d'avorter à l'étranger
(CEDH, 1992, Open Door c/ Irlande).
En droit français, l'embryon n'est pas sujet de droit puisque, pour
acquérir la personnalité juridique, il faut être né vivant et viable (C. civ.,
art. 318). Aussi, un enfant qui décède peu après sa naissance aura-t-il
acquis la personnalité juridique dès lors qu'il était théoriquement viable.
À l'inverse, un enfant mort-né n'aura jamais été sujet de droit. C'est la raison
pour laquelle le juge judiciaire refuse de qualifier d'homicide involontaire
la perte du fœtus résultant de l'accident de voiture dont une femme
enceinte fut victime (Cass. crim., 30 juin 1999, n° 97-82351). Sur un autre
plan, le Conseil constitutionnel a pu juger quant à lui que l'embryon ne
faisait pas partie des titulaires du droit à la protection de la santé (et
donc conclu à la constitutionnalité de la loi légalisant l'avortement (Cons.
const., 15 janv. 1975, n° 74-54 DC, IVG). Désormais constitutionnalisée
(LC 8 mars 2024), l'IVG est possible dans les premières semaines de
grossesse (14 semaines depuis la loi n° 2022-295 du 2 mars 2022) sur
simple décision de la femme enceinte et, à tout stade de la grossesse,
pour raison médicale gravissime concernant la femme ou l'enfant à naître
(CSP, art. L. 2213-1).
Le sort réservé à l'embryon se pose également dans le cadre de l'assistance
médicale à la procréation (AMP). Les techniques médicales
et scientifiques permettent depuis la fin des années 1970 de remédier à
l'infertilité de couples hétérosexuels, mais aussi à présent de répondre
au désir d'enfants de couples de femmes ou de femmes célibataires (loi
n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique). Or la technique de
la fécondation in vitro (FIV) interroge sur le devenir des embryons surnuméraires
(conçus en laboratoire et non utilisés). Les juges européens
ont eu l'occasion de préciser qu'ils ne sauraient être considérés comme
de simples biens au sens de l'article 1er
du protocole n° 1 de la CEDH,
de sorte que les personnes à l'origine de leur création n'en sont pas propriétaires
et ne peuvent en disposer librement (CEDH, 27 août 2015,
n° 46470/11, Parrillo c/ Italie). En France, ces embryons surnuméraires
peuvent, en fonction de la volonté de la femme ou du couple, être donnés
de manière anonyme à des personnes engagées dans un même processus
d'AMP, à la recherche ou encore être détruits.
Le droit à la vie soulève également de délicates questions éthiques à
l'autre extrémité de la vie.
La fin de vie
La Cour européenne juge que le droit à la vie n'empêche pas les autorités
nationales d'autoriser l'aide médicale à mourir pour les personnes en
fin de vie (CEDH, 13 juin 2024, n° 32312/23, Daniel Karsai c/ Hongrie),
dès lors que des garanties adéquates et suffisantes visant à éviter les
abus sont mises en place (CEDH, 4 oct. 2022, n° 78017/17, Mortier c/
Belgique). Pour autant, l'article 2 ne peut, « sans distorsion de langage,
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