Mélanges - Mélanges en l'honneur de Jean-Luc Vallens - 1re - 147

EMMANUELLE LE CORRE-BROLY

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suspensive du paiement du prix ne s'étant pas réalisée, le transfert de propriété
n'était pas intervenu au profit de l'acheteur. Le raisonnement est simple : le transfert de la propriété est suspendu tant que la créance n'est pas payée, l'extinction
de la créance ne vaut pas paiement. Donc le transfert de propriété ne s'est pas
opéré. Ainsi, le droit réel de propriété n'est pas atteint par l'extinction du droit
personnel de créance.
La survivance de la clause de réserve de propriété, accessoire de la créance du
prix, à la disparition de la créance, apparaît cependant bien difficile à justifier
pour la doctrine40 puisque, comme l'a relevé un auteur41, cela revient à dire que
« le vendeur demeurera propriétaire jusqu'au complet paiement d'une créance
éteinte ». Cette solution ne nous semble pourtant pas choquante lorsque le créancier est le vendeur réservataire puisqu'il est convenu avec l'acquéreur qu'il demeurerait propriétaire du bien tant que le prix ne lui serait pas réglé. Or, l'extinction
de la créance du vendeur ne vaut pas paiement, de sorte que le transfert de propriété ne peut s'opérer en faveur de l'acquéreur. En revanche, l'application de la
solution au prêteur subrogé dans la propriété réservée est éminemment critiquable
car, ici, la réserve de propriété n'est que l'accessoire d'une créance transmise par
subrogation au prêteur.
Quoi qu'il en soit, aux yeux de la jurisprudence rendue sous l'empire de la loi
de 1985, la déclaration de créance ne constituait nullement une condition d'acceptation de la revendication. A fortiori, sous l'empire de la loi de sauvegarde des
entreprises, la nouvelle sanction du défaut de déclaration de créance - l'inopposabilité à la procédure collective de la créance - doit rester sans conséquence sur
l'exercice de la revendication.
De même, la contestation de la créance est sans incidence sur la possibilité de
statuer sur la demande en revendication42.
Dans cette logique, pour apprécier si la valeur des biens restitués excède le
solde du prix restant dû, il faut considérer la fraction du prix convenu demeurée
impayée, peu important que cette créance impayée ait été déclarée43.
18. En conclusion, au terme de cette étude, force est de constater qu'en
matière mobilière, la subrogation dans la clause de réserve de propriété apparaît
comme une sûreté à la fois simple, souple, économique et très efficace puisque le
prêteur se voit conférer un droit exclusif sur le bien objet de la propriété réservée.
Cette efficacité n'est cependant assurée que dès lors qu'un certain nombre de
40. Rapp. Pérochon F. et Bonhomme R., Entreprises en difficulté, 6e éd., LGDJ, n° 288.
Adde, Mairot A., « La réserve de propriété analysée en une obligation réelle », Defrénois 2007/6,
art. 38557, p. 399 et s., spéc. p. 401, n° 7. V. Crocq P., JCl. Civ. Code, préc., n° 50 ; Le
Corre P.-M., préc., n° 813.72.
41. V. Crocq P., JCl. Civ. Code, préc., n° 50.
42. CA Paris, 18 sept. 2008, n° 07/13063.
43. Cass. com., 1er avr. 2008, n° 07-11726, Bull. civ. IV, n° 74 : Gaz. proc. coll. 2008/3,
p. 61, note Pérochon F. ; Act. proc. coll. 2008/9, n° 147, note Blanc ; JCP E 2008, 2062,
n° 12, obs. Cabrillac M. ; RTD com. 2008, p. 623, n° 4, obs. Martin-Serf A. ;
Rev. proc. coll. 2008/4, p. 46, n° 152, note Monsérié-Bon M.-H. ; Lexbase hebdo 24 avr.
2008, n° 302, note Le Corre-Broly E.
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