Les Précis Joly - Droit de l'ingénierie sociétaire - 3e - 273

L'ACQUISITION, LA GESTION ET LA TRANSMISSION D'UN PATRIMOINE... 273

du conjoint. En conséquence de quoi, l'opération d'apport doit nécessairement recueillir cet accord.
Les parts sociales reçues en rémunération de l'apport d'un bien personnel
bénéficient de la subrogation réelle et constituent à leur tour un bien personnel de l'apporteur.

2. L'apporteur est marié sous un régime de communauté de biens
466. Lorsque le futur associé est marié sous un régime de communauté de biens,
il convient de distinguer suivant que le bien apporté constitue un bien propre ou un bien commun.
a. Apport de biens propres
467. Une nouvelle distinction apparaît ici nécessaire.
S'agissant d'un apport en nature, les parts sociales reçues en rémunération
de cet apport seront à leur tour un bien propre, la subrogation réelle
jouant pleinement3.
S'agissant en revanche d'un apport en numéraire, il convient de bien prévoir l'insertion dans les statuts d'une clause d'emploi et de remploi, conformément à l'article 1434 du Code civil4. À défaut, les fonds apportés étant
présumés communs en vertu de la règle posée à l'article 1402, les parts
sociales reçues en rémunération le seraient également.
Enfin, les fruits et revenus des biens propres tombent dans la communauté,
conformément à l'article 1401 du Code civil5. Pour cette raison, comme
pour d'autres6, une attention particulière doit être portée dans les sociétés
patrimoniales à l'affectation annuelle du bénéfice : que celui-ci soit porté
en réserve, il accroîtra les capitaux propres de la société et donc la valeur
des titres dont le statut est propre ; qu'il vienne au contraire à être mis en
distribution, et il prendra un caractère commun. Malheureusement, force
est de constater que dans de trop nombreuses sociétés patrimoniales familiales, l'importance de cette question est absolument négligée : il arrive
même de constater l'absence de tenue de toute assemblée générale
annuelle pendant plusieurs années. Ceci est d'autant plus regrettable que
3. Cass. 1re civ., 10 juill. 1996, no 94-17471, Bull. civ. I, no 314.
4. Cass. 1re civ., 5 mars 1991, no 87-18298, Bull. civ. I, no 80. Un soin tout particulier devra être
apporté à la rédaction de la clause, la jurisprudence étant traditionnellement sévère en la
matière.
5. La Cour de cassation, première chambre civile, a ainsi jugé par un arrêt du 12 déc. 2006
(no 04-20663, Bull. civ. I, no 536) que les distributions de dividendes provenant de droits
sociaux ayant un caractère propre tombaient dans la communauté.
6. Nous pensons notamment au sort juridique et fiscal des distributions de dividendes en cas de
démembrement de propriété sur tout ou partie des parts sociales ou des actions ; voir supra
no 107 et s.

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