Droit et Société Classics - Les métamorphoses de la régulation politique - 1re - 114

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La régulation politique au regard des disciplines

juste choix de mettre en relation les bouleversements du statut de l'État
et la globalisation, il n'est pas possible d'ignorer une littérature récente
fortement inspirée par le caractère exemplaire du cas français de l'État
pour mieux comprendre les transformations de la légalité et ses rapports
au politique. C'est par cette référence à l'avènement de l'« État postmoderne » et à ses expressions que débutera notre analyse. C'est
ensuite aux changements de l'économie de la légalité (au sens de ce que
la réalité du droit n'est pas indépendante des appropriations sociales
dont celui-ci fait l'objet tant du point vue de la pratique que des
représentations sociales 2), observables à partir de ceux de l'État que
nous poursuivrons en soulignant que cette légalité s'inscrit dans un
processus historique d'affaiblissement. Nous verrons alors que de ce
constat découle des recherches de solutions diamétralement opposées
les unes aux autres. Mais ce qui constitue bien l'existence d'une tension
en la matière nous conduira à souligner que les deux conceptions qui
s'opposent pour aboutir à une restauration de la légalité ne peuvent pas
être considérées comme propres à l'univers juridique mais doivent être
rapportées à des conceptions antagonistes de la régulation politique
dont elles constituent en fait un exceptionnel révélateur. Les enjeux
autour de la régulation juridique sont plus que jamais constitutifs des
enjeux de la régulation politique.
L'avènement de l'« État post-moderne »
La France où régnait une mythification de la puissance d'un pouvoir
de l'État central constitue un laboratoire particulièrement illustratif des
transformations du statut de l'État en général, ceci à la mesure de la
place qu'il a occupé dans ce pays. Ces transformations justifient alors
pleinement l'expression d'« État post-moderne » 3. Au sein de celui-ci, la
relativisation de l'importance du droit se mesure à l'aune de la place qu'il
occupait dans la formation et la pratique de ceux qui servent l'État. Le
droit passe ainsi du statut d'« incarnation même de la Raison », conçu
comme un « ordre de contrainte », expression de cet « absolutisme
juridique » dont parle Paolo Grossi 4, à un droit lui-même « postmoderne ». Ce dernier est exposé à une affirmation croissante des droits

3.
4.

Voir sur ce point : Susan SILBEY, « Étudier la "conscience du droit": construction
d'une théorie de l'institution à partir de micro-données », Droit et Société, n° 100,
2018, p. 733-788, p. 763.
Jacques CHEVALLIER, L'État post-moderne, Paris, Lextenso éditions, coll. « Droit et
Société Classics », 2018, 5ème éd. (1ère éd. 2003).
Paolo GROSSI, L'Europe du droit, Paris, Seuil, coll. « Faire l'Europe », 2011.

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