Finances publiques et fiscalité - Les transformations de l'ordonnancement juridique douanier en France - 400

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LES TRANSFORMATIONS DE L’ORDONNANCEMENT JURIDIQUE DOUANIER EN FRANCE

1028. Fondée sur une prise de position idéologique, la qualification de répa‑ ration civile donnée aux sanctions douanières a été intégralement reprise par le juge. Mais, on remarque que dès la fin du xixe siècle, cette analyse a commencé à être contestée. B. LA PROGRESSIVE AFFIRMATION DU CARACTÈRE MIXTE DES SANCTIONS 1029. La nature indemnitaire des sanctions douanières a été critiquée à partir de la fin des années 1870 car elle privait les fraudeurs d’un grand nombre de garanties offertes en droit fiscal ou en droit pénal. Cela s’explique sous doute par le caractère répressif du Code des douanes. Ainsi, par exemple, le Profes‑ seur E. Villey faisait ainsi remarquer que « sans prétendre remettre en question une doctrine si généralement reçue, nous ne pouvons nous empêcher de souligner qu’elle est arbitraire. Nous ne nions pas que les amendes n’aient en matière fiscale un caractère particulier. Mais les classer dans la catégorie des dommages‑inté‑ rêts, comme de simples réparations civiles, c’est là une manifeste exagération du droit. (…) La vérité est que les amendes conservent même dans cette matière leur caractère pénal »184. Tirant les enseignements de ses fonctions de juge de paix, L. Pabon notait lui aussi que si « l’amende représente une réparation civile c’est‑à‑dire le préjudice que l’infraction commise a causé à l’État, elle constitue aussi une peine »185. 1030. Ces critiques ont semble‑t‑il trouvé un écho auprès de la Cour de cassation. Dans un arrêt rendu, sur conclusions contraires le 28 janvier 1876, elle a affirmé que « les peines ont, en matière de douanes, le caractère de réparations civiles »186. Le revirement de jurisprudence est implicite. Le juge sous‑entendrait que les sanctions douanières peuvent avoir une autre nature qu’indemnitaire. Elles peuvent également poursuivre, une finalité répressive. Elles seraient établies aussi pour punir les fraudeurs et les dissuader de recommencer. Cet arrêt sera confirmé dans une décision du 30 avril 1897. En l’espèce, la Cour a posé claire‑ ment que « les amendes, si elles n’ont pas toutes les caractéristiques des amendes pénales, sont des peines d’une nature particulière et qui n’ont pas exclusivement le caractère d’indemnité ou de réparation civile »187. Depuis, cette analyse a été consacrée par les juges judiciaire188 et administratif189. 1031. Même si elle « impose un jonglage entre les principes de la fiscalité et des règles répressives »190, cette solution permet de faire bénéficier les fraudeurs
184. E. Villey sous Cass. crim., 28 janvier 1876, Administration des douanes c/ Ribeaucourt, S., 1876, 1, p. 89. 185. L. Pabon, Traité manuel du service des douanes (Brigades et bureaux ; contentieux), Paris, L. Larose, 1901, p. 387. 186. Cass. crim., 28 janvier 1876, Administration des douanes c/ Ribeaucourt, S., 1876, 1, p. 89. 187. Cass. crim., 30 avril 1897, Administration des douanes c/ Tonkin, S., 1899, 1, p. 529. 188. Cass. crim., 11 avril 1907, Bonnassieux c/ Administration des douanes, S., 1909, 1, p. 113 ; Cass. civ., 16 juillet 1925, Administration des douanes c/ Aureillan, D., 1925, RH., p. 648 ; Cass. Req., 11 mars 1940, Ditzler, D., 1940, 1, p. 52 ; Cass. crim., 25 mai 1981, SARL Domerc, Bull. crim. n° 169 ; Cass. crim., 7 avril 2004, Maclouf, Bull. crim. n° 91. 189. CE, 24 février 1922, Administration des douanes c/ Sieur A., D., 1922, 3, p. 41, (note L. Trotabas) ; CE, 7 janvier 1927, Fauran, D., 1927, 3, p. 26. 190. L. Trotabas sous Cass. crim., 16 juin 1927, Administration des douanes c/ X., D., 1928, 1, p. 771.

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