Hors Collection - La nouvelle administration financière et fiscale - 95

MARIE-CHRISTINE ESCLASSAN

que la proportionnalité de la sanction est assurée en droit fiscal français par le taux institué par la loi qui s’impose par conséquent à l’administration et au juge, ce dernier étant seulement chargé de vérifier que l’administration a respecté les dispositions instituées par la loi. La Cour de cassation avait réaffirmé ultérieurement que l’article 6 § 1 de la CEDH ouvre un recours de pleine juridiction pour que la sanction fiscale puisse être proportionnée au comportement du contribuable (Cass. com., 1er juill. 2003, no 00-13966). ´ Dans les dernières années, le Conseil d’Etat a étendu et renforcé sa position défavorable au pouvoir de modulation du juge en matière fiscale. Tout en rappelant que conformément à l’article 6 de la CEDH, les sanctions doivent respecter un principe de proportionnalité entre la lourdeur de la sanction et le comportement qu’elles visent à réprimer, il a néanmoins conclu à la conformité à la CEDH d’une pénalité à taux unique (CE, 30 nov. 2007, Sté Siderne, req. no 292705) 6. Le sujet a néanmoins connu de nouveaux développements dans la jurisprudence administrative à la faveur de la question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil ´ d’Etat a ainsi estimé que ce nouveau recours le conduisait à soumettre au Conseil constitutionnel la question de savoir si la loi qui ne prévoit pas la possibilité pour le juge de l’impôt de moduler le taux des pénalités fiscales est conforme aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines (CE, 17 oct. 2010, no 331113). Le Conseil constitutionnel a toutefois conclu à la conformité à la Constitution des dispositions concernées du Code général des impôts (Cons. const., 17 mars 2011, décisions nos 2010-103 QPC, 2010-104 QPC, 2010-105/106 QPC).

2) Les sanctions de nature juridictionnelle
Il s’agit des sanctions prononcées par le juge pénal. Ces sanctions ont un caractère résiduel en premier lieu dans la mesure où elles ne sont encourues qu’à raison d’infractions constitutives d’un délit de fraude fiscale. Or d’une part toutes les fraudes ne sont pas constitutives d’un délit qui suppose la réunion d’un élément matériel (une fraude revêtant un caractère de gravité certain) plus un élément intentionnel (une volonté consciente d’organiser la fraude en vue de se soustraire à l’impôt). D’autre part dans la pratique ne sont poursuivies au plan pénal que les affaires considérées comme les plus graves (un millier de dossiers environ par an). Bien qu’il s’agisse de sanctions juridictionnelles, l’administration joue un rôle important dans le domaine dans la mesure où non seulement c’est elle qui est à l’origine des poursuites devant le juge répressif mais où elle en a aussi le monopole. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le législateur a voulu encadrer cette initiative. Lorsque l’administration décide de poursuivre au plan pénal, elle ne peut le faire que sur avis conforme d’une instance qu’elle doit préalablement saisir, la Commission des infractions fiscales (LPF, art. 228), cette instance étant composée de 12 membres ´ (réunissant des membres du Conseil d’Etat et des magistrats de la Cour de cassation).
6. Il s’agissait d’une pénalité spéciale pour défaut de déclaration de la mention de la taxe exigible ´ en matière de TVA ; le Conseil d’Etat a validé le taux unique en considérant que le législateur avait prévu plusieurs taux relatifs aux défauts de déclaration en matière de TVA et donc plusieurs sanctions offrant une gradation des peines et des taux.

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