Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 31

Le rôle des États dans le développement des marchés financiers au

XIX

siècle

Sous la monarchie censitaire (1815-1848) se constitua « la Haute
banque »20, expression qui désigne un ensemble d'une vingtaine
d'établissements21 qui intervenaient sur le marché international des
capitaux. L'émission des emprunts d'État fut opérée d'abord par la
banque Rothschild, qui obtint un quasi-monopole sur ces opérations, y
compris dans le placement des fonds européens car même les émissions
étrangères étaient principalement des titres publics.
L'inscription des emprunts étrangers à la cote officielle de Paris avait
été interdite en 1785 (cf. supra) mais l'ordonnance des 12-18 novembre 1823
leva la prohibition22, motif pris, selon les termes de ce texte, que « la
permission de coter, sur le cours authentique de la Bourse de Paris, les effets
publics des emprunts des gouvernements étrangers n'implique, de la part de
notre gouvernement, ni approbation desdits emprunts, ni obligation
d'intervenir en faveur de ceux de nos sujets qui, de leur plein gré, y
placeraient leurs capitaux, considérant que, depuis plusieurs années, les
opérations de banque, de finance et de commerce, ont reçu, dans le royaume,
mais plus particulièrement à Paris, une grande extension, qu'il en est résulté
un accroissement de capitaux qui rend désormais sans objet les dispositions de
l'arrêt ci-dessus relaté ; considérant enfin qu'il ne peut qu'être utile de donner
un caractère légal et authentique aux opérations nombreuses qui se font déjà
sur les emprunts des gouvernements étrangers, les lois actuelles suffisant
pour prévenir la fraude et l'insertion de conditions illicites ou illégales dans leur
négociation »23.
À la fin du XIXe siècle, les pouvoirs publics incitèrent les épargnants à
souscrire des emprunts de l'État russe, dans la perspective d'une alliance
anti-allemande24. Un syndicat de banques parvint à rompre le monopole de
la maison Rothschild sur ces emprunts. L'analyse économique rétrospective
a montré que « le choix des emprunts russes était parfaitement pertinent du
point de vue d'un investisseur français »25. Ces placements russes étaient
20. STOSKOPF N., « Qu'est-ce que la haute banque parisienne au XIXe siècle ? » communication
faite à la Journée d'études sur l'histoire de la haute banque, organisée le 16 novembre 2000
par la Fondation pour l'histoire de la haute banque, en ligne (nous changeons le temps
des verbes, R.P.).
21. Parmi des noms célèbres, on peut relever celui du banquier Fould qui servit de modèle à
Balzac dans son roman paru en 1837 sous le titre La Maison Nucingen mais qui avait été
initialement intitulé La Haute Banque (cf. Pierre Citron, « Introduction » in BALZAC, La
Comédie humaine, VI, Gallimard, 1977, La Pléiade, p. 316). Sur d'autres livres de Balzac
ayant trait au monde de la Bourse, cf. not. LAGNEAU-YMONET P., « Ferragus, une
"sociologie-fiction" de la confiance », Actes de la recherche en sciences sociales 2007/4
(nº 169), p. 94-104.
22. Cf. HAUTCOEUR P.-C. et ROMEY C., « Les émetteurs autres que l'État » in GALLAIS-HAMONNO G. et
HAUTCOEUR P.-C. (dir.), Le marché financier français au XIXe siècle, vol. 1. Récit, 2007,
Publications de la Sorbonne, p. 208.
23. MOLLOT, Bourses de commerce, agents de change et courtiers, 1834, Librairie de
jurisprudence, de H. Tarlier, p. 59.
24. Cf. PELLET R., Droit financier public, op. cit. p. 281 et 291.
25. LE BRIS D., Les actions françaises depuis 1854 : analyses et découvertes, Thèse d'économie,
Université d'Orléans, 2011, p. 28 (nous changeons le temps des verbes, R.P.).

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