Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 76

États et marchés financiers

du 18 octobre 1945, qui précisa que « des intermédiaires dénommés
courtier en valeur mobilière sont seuls habilités à effectuer la négociation
des valeurs non admises au Bulletin Officiel de la Bourse ». Cette
validation de la loi de 1942 fut contestée par les gérants juifs qui avaient
survécu à la Guerre et dont la clientèle avait été captée par leurs
confrères. En revanche, concernant les agents de change, les quatre
charges furent restituées aux juifs qui en avaient été spoliés. Le double
monopole des agents de change et des courtiers en valeur perdura
jusqu'en 1961 (cf. infra).

2. La « politique du circuit » aux dépens de la Bourse
De façon surprenante au premier abord, car la conjoncture économique
était évidemment très défavorable et « que les transactions boursières
[étaient] contrôlées par une stricte régulation anti-spéculation » (cf. infra),
le cours des actions augmenta d'abord très fortement jusqu'en
janvier 194366, du fait, d'une part, que les investisseurs les préféraient aux
obligations, « car leur valeur n'était pas directement affectée par la forte
inflation de la période », et, d'autre part, parce que « les possibilités
d'investissement dans d'autres actifs étaient particulièrement réduites par
la pénurie »67. Cependant, les autorités allemandes et françaises voulurent
« diriger les capitaux vers les titres d'État », le gouvernement de Vichy
souhaitant « boucler son "circuit" et stabiliser le franc tandis que, pour les
autorités allemandes, il s'agissait de financer la guerre »68, de sorte que les
bons du Trésor devinrent le principal placement des banques, qui ne
pouvaient pas trouver d'alternatives, du fait de l'encadrement et du
ralentissement des activités économiques.
La Banque de France fut également mise à contribution, par les avances
qu'elle devait accorder à l'État, même si elles s'avéraient moins
importantes que dans le passé. Le taux d'escompte de la Banque centrale
fut réduit afin de maintenir des taux d'intérêt assez bas, malgré le risque
d'inflation.
De plus, profitant de l'absence d'emplois de l'épargne, le régime de Vichy
procéda à plusieurs conversions d'emprunts émis sur les marchés, les
investisseurs n'ayant le choix qu'entre un remboursement anticipé et une
réduction substantielle de l'intérêt servi. Ces mesures eurent deux
conséquences importantes : d'une part, les conversions eurent pour effet
d'écarter durablement les Français des marchés financiers ; d'autre part,
elles réduisirent très sensiblement la part des charges de la dette dans les
charges totales de la trésorerie : elle « passa d'environ un tiers pour les
66. Par la suite, les valeurs françaises connurent une très forte perte en valeur réelle (de
l'indice 100 à 12) de même que les emprunts d'état (de l'indice 100 à 5).
67. LAGNEAU-YMONET P. et RIVA A., « L'épuration à la Bourse de Paris », in BARJOT D., FRIDENSON P.,
JOLY H. et MARGAIRAZ M. (dir.), L'épuration économique en France à la libération, 2008, Presses
Universitaires de Rennes.
68. Idem.

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