Manuels - Introduction historique au droit (XIIIe-XXe siècle) - 4e - 100

INTRODUCTION HISTORIQUE AU DROIT l'ancienne Rome. Le Code Théodosien y avait laissé mieux que des traces. Il avait été utilisé dans les Lois romaines des Barbares et constituait, avec le Manuel du IVe siècle connu sous le nom abusif de Sentences de Paul, une partie importante de la Loi romaine des Wisigoths, plus connue sous le nom de Bréviaire d'Alaric (v. 506). L'utilisation de cette compilation juridique est attestée par les nombreux manuscrits du Bréviaire, ou d'abrégés (les Epitome du Bréviaire) qui nous sont parvenus. En Italie, la reconquête byzantine avait favorisé le retour des compilations justiniennes (Digeste, Code, Institutes) et la connaissance des Novelles (les constitutions nouvelles) des empereurs de Byzance3. Les actes de la pratique, les formulaires d'actes préparés pour les praticiens du Ve au IXe siècle témoignent eux aussi de l'utilisation du droit romain par les rédacteurs d'actes. D'autre part, il ne faut pas oublier le rôle que jouèrent les hommes d'Église dans cette conservation et dans l'utilisation du droit romain. Des clercs, à peu de chose près les seuls hommes instruits de l'époque (d'où le double sens du mot clerc : membre du clergé et homme instruit), reproduisent des passages de textes juridiques romains dans les collections qu'ils composent4 pour faire connaître le droit qu'ils veulent voir appliquer. Ils utilisent également le droit romain dans les actes qu'ils rédigent (ventes, donations, dispositions de dernière volonté, etc.). 92. L'essor. - La redécouverte du Digeste (recueil de fragments des écrits des juristes romains des Ier-IIIe siècles), vers 1050/1070 probablement5, dans des conditions mal connues, donne un essor imprévu au droit romain, en Italie d'abord, bientôt dans la France du Sud, puis dans toute l'Europe occidentale. Vers la fin du XIe siècle, à Bologne, on l'étudie et on le commente6. Plus tard, sont connus le Code de Justinien (recueil de fragments de constitutions impériales du IIe au di Orazio CONDORELLI, Il Cigno Edizioni, 2004, 5 vol. ; compte-rendu par B. BASDEVANT, RHD, 84 (3), 2006, p. 451-576 ; F. DEMOULIN-AUZARY, Les actions d'état en droit romano-canonique, mariage et filiation (XIIe-XVe siècles), Paris, LGDJ, 2004 ; plusieurs articles sur la « vulgarisation » du droit savant et sur l'histoire des incunables dans R. FEENSTRA, Histoire du droit savant (13e-18e s.), Aldershot, Ashgate Variorum, 2005. Également, Revue Droits..., 2007 et 2008 (nº 46, 47, 48), où est largement débattue la question des liens entre droit romain, droit coutumier, droit savant et droit commun (notamment l'étude d'Y. MAUSSEN, « A demonio merediano ? Le droit savant au Parlement de Paris », Droits, ... 48, 2008, p. 159-247) ; A. PADOA-SCHIOPPA, Italia ed Europa nella storia del diritto, Bologne, Il Mulino, coll. di Testi e di Studi, 2003 (et le compte-rendu par J. Hilaire, RHD, 85 (1), 2007, p. 85-104) ; W. CAIRNS et P.-J. DU PLESSIS, The creation of the jus commune, from Casus to Regula, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2010. 3. Une collection de Novelles, dite Epitome de Julien, compilée vers 555 en Orient, circule en Occident. En ce qui concerne les compilations de Justinien, elles avaient été envoyées en 555 au pape Vigile à Rome. Cependant, seules les Institutes et le Code avaient fait l'objet d'une petite diffusion. Le Digeste était tombé dans un oubli total dès la fin du VIe siècle. 4. Par exemple vers la fin du IXe siècle, une collection canonique italienne en 12 livres, l'Anselmo dedicata emprunte 242 de ses chapitres au droit romain. 5. Vers 1090/1093, le compilateur anonyme d'une collection canonique (dite Britannica du nom du lieu du seul manuscrit qui nous soit parvenu, la British Library) insère, dans son recueil, 91 fragments pris dans le Digeste. On les retrouve dans le Décret d'Yves de Chartres, vers 1093/94. 6. Connu successivement en trois apports, désignés par la suite sous les noms de Digeste Vieux (Liv. I à XXIV), Digeste Nouveau (Liv. XXXIX à L), Infortiat (Liv. XXIV à XXXV, 2) et Trois Parties (Liv. XXXV, 3 à XXXVIII, inclus). Il sera connu par deux manuscrits désignés du nom des villes qui les conservent : littera Bononiensia (Bologne) et littera Pisana-Fiorentina (Pise et Florence, où on le voit encore). 100

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