Manuels - Introduction historique au droit (XIIIe-XXe siècle) - 4e - 153

Le renouveau de la pensée juridique juridique. Inspiré de la philosophie stoïcienne, un fort courant de la pensée antique voyait dans le droit naturel un ensemble de règles immuables, gouvernant la nature elle-même, animaux et tout être vivant. S'attachant au concept de droit naturel, les romains avaient en outre développé la notion de jus gentium (droit des gens). Ce jus gentium se distingue du droit naturel, car il règle les rapports des hommes les uns avec les autres, des sociétés, voire des nations les unes avec les autres et non pas ceux de toute la nature, dans tous les lieux et à toutes les époques. La troisième catégorie de règles juridiques est celle formant le droit civil, applicable à une cité donnée, à ses citoyens, en somme le droit positif. Telles sont les vues exposées au Livre premier des Institutes de Justinien (Titre II, De Jure naturali, gentium et civili ; du droit naturel, des gens, et civil). Dans une vision classique, le droit des gens apparaît comme une sorte de moyen terme entre droit naturel et droit positif, dans un cadre politique défini et limité. Il s'appuie sur le droit naturel auquel il est conforme et, concernant les hommes, il est constitué d'un ensemble d'institutions ou de règles que l'on rencontre chez pratiquement tous les peuples, ce qui permet de conclure à sa conformité à la nature humaine, tout en se situant dans une société et à une époque données. Le droit naturel est plus large, car contient les règles régissant toute la nature et pas seulement les individus, en dehors de toute contingence d'espace ou de temps. Dans cet ensemble, on reconnaît également la légitimité d'un droit positif, assurant le fonctionnement d'une société spécifique, d'une cité, dans un cadre particulier, à un moment donné. B. Les juristes humanistes 153. Ils reprennent souvent les mêmes concepts ; sans renier les définitions des anciens, ils proposent leur propre conception en donnant une nouvelle importance à certaines notions. 154. Le droit naturel est au centre de la pensée juridique, mais on insiste à partir du XVIe siècle sur le fait que ce droit naturel est lui-même une création de la raison humaine. Sous l'influence de l'humanisme, les doctrines juridiques s'attachent à montrer le caractère rationnel de la règle de droit et tout particulièrement du droit naturel. Les principes énoncés dès le e e e XVI siècle prendront leur plein essor aux XVII et XVIII siècles, lors du développement de l'école dite du droit naturel3. Ce courant est marqué par le désir de lier plus étroitement le droit naturel au domaine spécifiquement juridique et pas seulement philosophique. De grands principes, que l'on prétend tirés de la nature, deviennent règles de droit possédant une 3. Les travaux de Michel Villey demeurent fondamentaux. Plus récemment : M. AYUSO (éd.), Cuestiones fundamentales de Derecho natural. Actas de las III Jornadas Hispanicas de Derecho natural (Mejico, 26-28 novembre 2008), Madrid, Marcial Pons, 2009 ; J. EISFELD, M. OTTO, L. PAHLOW et M. ZWANZGER, Naturrecht und Staat in der Neuzeit, Diethelm Klippel zum 70. Geburstag, Tübingen, Mohr Siebeck, 2013 (on trouvera, dans chacun de ces deux volumes, de belles analyses des doctrines du droit naturel classique et de leur apport au droit contemporain, dans les domaines du droit public, du droit privé et du droit pénal) ; L. GIAVARINI (dir.), L'écriture des juristes XVIe-XVIIIesiècle, Paris, Classiques Garnier, 2010. 153

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