Manuels - Introduction historique au droit (XIIIe-XXe siècle) - 4e - 225

L'État monarchique souverain 254. Mentionnons enfin les secrétaires d'État, généralement au nombre de quatre avec statut de commissaire40. Leurs prérogatives n'ont jamais été codifiées ; elles ne s'analysent pas en un pouvoir de décision officiellement reconnu, mais n'en sont pas moins déterminantes. Ils contresignent les actes royaux, ce qui ne représente pas un contrôle du contenu de l'acte, mais seulement une authentification de la signature royale. De fait, depuis Charles IX, le roi fait apposer sa signature par un commis ; le contreseing ministériel authentifie l'acte, le secrétaire d'État devant s'assurer de sa pleine conformité à la volonté royale. Les secrétaires d'État veillent à l'expédition des actes, puis à leur application et exécution. Le roi attribue à chacun une compétence ratione materiae, parlant déjà de « département », origine de notre terminologie actuelle sur la notion de département ministériel. La répartition de ces tâches varie selon les rois et même au cours des règnes41. Tous les matins, les secrétaires d'État se rendent auprès du roi pour y prendre ses ordres. Ils sont assistés dans leur travail par des commis et des clercs, origine de nos bureaux ministériels. Les maîtres des requêtes sont couramment appelés à seconder un secrétaire d'État, notamment dans l'élaboration des textes fondamentaux, ceux qui seront ensuite éventuellement promulgués comme ordonnances royales. Le roi réunissait ses conseillers selon diverses formations, en fonction des questions à aborder et des circonstances politiques42. Par toutes ces 40. Leur origine remonte à la fin du XVe siècle. Pendant longtemps, le chancelier avait sous ses ordres des notaires et des secrétaires du roi, auxiliaires chargés de rédiger les actes. Plus les charges du chancelier s'accrurent et plus certains de ces secrétaires prirent de l'importance. À partir de François Ier, et encore davantage par la suite, ils se détachèrent progressivement des services du chancelier et collaborèrent plus directement avec le roi. Dans la seconde moitié du XVIe siècle, ils prêtent serment au roi en personne et non plus au chancelier. Ils acquièrent de plus en plus de pouvoir (cf. N. SCHAPIRA, « Occuper l'office. Les secrétaires du roi comme secrétaires au XVII e siècle », Revue d'histoire moderne et contemporaine, 51-1, 2004, p. 36-61). 41. Signalons ce qu'elle fut lors du gouvernement personnel de Louis XIV, exemple significatif pour deux raisons : parce qu'il dura longtemps (1661-1715) et, surtout, parce que le règne de Louis XIV marqua l'apogée du fonctionnement de la monarchie dite absolue, d'une administration strictement organisée, ainsi qu'un tournant dans le rôle de la monarchie dans la production du droit. - Le secrétaire d'État à la Maison du Roi chargé de tout ce qui relève de la politique intérieure du Royaume, notamment des questions religieuses, qu'il s'agisse de la lutte contre les protestants ou de la nomination aux bénéfices ecclésiastiques et plus généralement des relations avec le clergé de France. - Le secrétaire d'État à la Guerre. - Le secrétaire d'État à la Marine. - Le secrétaire d'État aux Affaires Étrangères. Cette répartition des tâches illustre la place prépondérante de la politique extérieure par rapport aux affaires de politique intérieure. Sur l'organisation des services et bureaux dépendant du secrétaire d'État à la guerre, voir A. BUOT DE L'EPINE, « Les bureaux de la guerre à la fin de l'Ancien Régime », RHD, 54, 1976, p. 533-558 ; l'auteur décrit une structure déjà précise et une bureaucratie qui se développe. 42. Le Conseil peut se réunir en diverses formations qui correspondent aux multiples secteurs de compétences du gouvernement ; ces domaines ayant des contours variés, les différentes instances du Conseil varient elles aussi. Au début du XVIe siècle, François Ier distingue deux grandes catégories d'affaires, traitées selon des modalités différentes. - 1) Les affaires strictement gouvernementales sont envisagées dans des réunions restreintes, secrètes, fréquentes et présidées par le roi. Il s'agit du Conseil étroit, ou Conseil des affaires. - 2) Les affaires administratives ou judiciaires sont réglées dans une autre branche du Conseil, au personnel plus nombreux ; mais la plupart des nobles se désintéressent de ces questions techniques et laissent conseillers d'État, maîtres des requêtes et autres juristes agirent à leur place. Après le règne de François Ier, on prit l'habitude de distinguer à l'intérieur même de cette seconde branche, un Conseil d'État et des finances, aux missions surtout administratives, et un Conseil des parties ou privé, chargé de rendre la justice. 225

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