Hors collection - Droit de la musique - 279

Application des règles de concurrence au secteur musical

279

Enfin, s'agissant de la caractérisation de l'abus, le juge des référés a estimé que
« le refus de fourniture du catalogue faute d'accepter les conditions de la société Universal
Music France, conditions qui sont différentes de celles contenues dans les contrats précédents et ce en contradiction avec les engagements pris lors de l'accord de janvier 2011,
constitue à lui seul un abus de position dominante, car le refus porte sur un produit qui
est objectivement nécessaire pour exercer une concurrence efficace sur le marché, que le
refus est susceptible de conduire à l'élimination d'une concurrence effective sur le marché
et enfin le refus est susceptible de léser le consommateur ».
On peut faire une analyse critique de cette décision, qui n'est au demeurant
qu'une décision de référé et n'a pas été soumise aux juges du second degré,
puisqu'entre-temps, les sociétés Universal et Blogmusik ont su trouver un accord.
Il est certain que, sur le plan juridique, la caractérisation du marché pertinent et de
la position dominante de la société Universal mériterait une analyse économique
plus approfondie si la problématique était portée au fond ; par ailleurs, cette décision
ne pourrait signifier qu'un exploitant en position dominante n'ait pas la faculté de
modifier ses conditions commerciales, sans prendre le risque, en cas de refus de ces
nouvelles conditions par la plate-forme d'écoute de musique en ligne, de se rendre
coupable d'un abus de position dominante.
Il est un fait toutefois que dans le rapport de mission intitulé « Acte II de l'exception
culturelle à l'ère du numérique », remis en 2013 par M. Pierre Lescure à la ministre
de la Culture et de la Communication et au président de la République, le mécontentement des représentants des plateformes françaises était toujours sensible, ces
derniers estimant que « les conditions imposées par les détenteurs de catalogues ne leur
permettent pas d'atteindre la rentabilité et encore moins de financer les investissements
indispensables à l'innovation, au marketing et au développement international. Les
barrières à l'entrée persistent et conduisent à une situation paradoxale : tandis que le
chiffre d'affaires de la musique en ligne croît fortement, aucun nouvel acteur français
n'émerge et de nombreux acteurs existants disparaissent ou sont menacés. Les risques de
concentration de l'offre autour d'un oligopole majoritairement américain sont réels »59.

Section 3
concurrence

et sociétés de gestion coLLective

539. Division. L'application des règles de concurrence aux sociétés de gestion
collective60 soulève des difficultés en ce qui concerne les rapports qu'elles entretiennent
avec les utilisateurs (§ 1), tout comme dans leurs rapports avec les créateurs (§ 2).
59. Rapport de mission du 13 mai 2013, p. 19 § 1, disponible à l'adresse internet suivante : www.culturecommunication.gouv.fr/content/download/67200/515190/version/4/file/130513+-+DP+Remise+du+rapport+d
e+Pierre+Lescure. pdf.
60. Sur ce sujet, v. Y. Diringer, Gestion collective des droits d'auteur et droit de la concurrence, pour une relecture
à l'heure d'internet, Thèse PUAM, 2011.
http://www.culture
Hors collection - Droit de la musique

Table des matières de la publication Hors collection - Droit de la musique
