Précis Domat - Institutions judiciaires 2017-2018 - 16e - 224

INSTITUTIONS JUDICIAIRES

titre. À cette place, il ne saurait être question d'énumérer, et encore moins d'étudier, tous les cas où le Conseil d'État est saisi en premier et dernier ressort (sur ces
cas, cf. art. R. 311-1 C. just. adm.). Cette question fera l'objet de développements
très étendus dans le cours de contentieux administratif. Pour l'instant, on se bornera
à souligner que, d'une manière générale, le Conseil d'État est compétent en premier
et dernier ressort lorsqu'il s'agit de mettre en cause un acte de portée nationale,
pour lequel par conséquent il est indispensable que la juridiction appelée à se prononcer ait une autorité également nationale. Sous réserve d'un bon nombre de
nuances (que l'on négligera pour l'instant), la portée nationale d'un acte, justifiant
la compétence directe du Conseil d'État, peut se rattacher à plusieurs critères :
a) La personnalité de l'auteur de l'acte contesté. Ainsi en est-il des recours en
annulation formés contre les ordonnances du président de la République, et « contre
les actes réglementaires des ministres » (par exemple contre un arrêté ministériel).
On comprend facilement la raison d'être d'une telle règle : par définition, ces actes
émanent d'une autorité nationale (président de la République, Premier ministre ou
ministre) ; il est donc indispensable de centraliser tout le contentieux devant une
juridiction dont l'autorité est également nationale.
b) Le statut de l'agent public intéressé par la mesure contestée. Il s'agit essentiellement des recours formés contre les mesures individuelles concernant des fonctionnaires (ou des agents publics en général) nommés par décret du président de la
République : par exemple, un recteur d'académie, un préfet, un général, etc. Ces
agents étant appelés, du fait même des modalités de leur nomination, à exercer
des responsabilités importantes sur le plan national, il est préférable d'éviter une
dispersion du contentieux relatif à leur situation individuelle devant des juridictions
administratives régionales.
On remarquera simplement que ce chef de compétence directe ne fait pas double emploi avec
le cas précédent : ce qui est visé, ce n'est pas en effet l'acte de nomination qui émane du président
de la République, mais toute mesure, quel qu'en soit l'auteur, qui pourrait affecter la situation
individuelle de cet agent public.

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II. Le Conseil d'État, juge d'appel. - Au moment de la réforme de 1953 qui
institua les tribunaux administratifs (supra, no 276), le Conseil d'État devint juge
d'appel de droit commun, en ce sens que tous les appels formés contre les jugements rendus au premier degré par les tribunaux administratifs devaient être portés
devant le Conseil d'État, à moins qu'un texte spécial n'en dispose autrement. Ce
n'est plus vrai aujourd'hui depuis la réforme de 1987 qui a institué les cours administratives d'appel (supra, no 281) : désormais ce sont elles qui, en principe, ont
vocation à statuer sur les appels formés contre les jugements rendus par les tribunaux administratifs, et non plus le Conseil d'État.
Cette règle de principe est cependant loin d'être absolue et, encore de nos jours,
le Conseil d'État conserve, à titre exceptionnel, une vocation de juge d'appel.
a) D'abord, il en est ainsi toutes les fois que la décision de première instance
émane d'une juridiction autre que le tribunal administratif (art. L. 321-2 C. just.
adm.). Dans ce cas, en effet, la cour administrative d'appel n'étant pas compétente,
l'appel ne peut être porté que devant le Conseil d'État, si ce n'est dans les hypothèses où la décision a été rendue par une juridiction administrative à compétence
spéciale qui a sa propre hiérarchie au second degré (infra, no 299).
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